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De loin en loin

Ressentis, engagements, appropriations, révoltes, doutes, certitudes, réflexions…
Un peu de littérature aussi, de philosophie, d’écriture s’il se peut, de poésie.
Et de musique, on en a tellement besoin !
C’est dans cette approximative petite lucarne que verront le jour, périodiquement,
mais irrégulièrement sans doute, mes humeurs pas toujours égales.
Et s’il se pouvait que vienne y réagir l’une ou l’autre intelligence,
je ferai le trajet de n’en être pas peureux.

Belle découverte à vous !

“Des loups bruns qui passent pour des agneaux blancs” 

Partages, Révoltes Posted on 27 janvier 2024 14 h 00 min

Tombe, l’autre jour, dans ma boîte mail, cet article relayé de Mediapart.
Un cadeau d’une très chère amie dont il m’est arrivé, sur ce blog,
de dire trois mots et un peu plus de son travail d’artiste.

C’est un texte de Mohamed Mbougar Sarr, Prix Goncourt 2021
pour son roman La Plus Secrète Mémoire des hommes.

On a tout d’abord envie de commenter ce texte si beau,
de marier notre colère à la sienne,
comme une guise d’accord dont il n’a pas besoin.
Puis s’impose la volonté de se taire.
Non pas parce que se taire est consentir, simplement consentir, non,
mais parce que c’est dans notre attention sans ego, silencieuse donc,
que doivent grandir, se dit-on, les germes de notre réflexion en même temps
que doit se régénérer notre révolte.

Alors, voici :


Que Mediapart ne m’en veuille pas du “vol” de ce texte écrit pour lui.
Que Mohamed Mbougar Sarr me pardonne.
Mon très modeste larcin ne sert rien d’autre qu’une volonté de propager
(un tout petit peu, à la mesure des très pauvres résonances de ce blog)
une pensée, une révolte, une détresse parfois, dont on est en droit, je crois,
de la trouver à la fois légitime et justifiée.



À bientôt ?



Du mal à dire

Partages, Révoltes Posted on 4 novembre 2023 17 h 51 min

On est quand même fichtrement mal embarqués entre le mal et le mal.

On n’a plus vraiment le choix, se dit-on.
Le choix est d’un autre temps entre les bons et les méchants.

Qu’on se rassure,
aujourd’hui il n’y a plus que des bons
qui montrent du doigts des méchants
qui disent que ce sont eux, les bons.

On est mal embarqués dans le bac à sable.
On n’est pas habitués à y croiser des milliers d’enfants tués.
Va falloir choisir.
Cesser de n’avoir à la bouche que le sifflet de l’arbitre.
Il va falloir prendre ses responsabilités, dire ce qu’on a du mal à dire.
Commencer à réfléchir.

On peut ne pas avoir honte de penser.

De penser, je dis ça au hasard,
que les victimes ne sont pas toujours celles qu’on pense.
En tous cas pas exclusivement.
Je dis ça au hasard, mais pas vraiment.

On peut ne pas avoir honte de penser
qu’Israël (je dis Israël, je ne dis pas les Juifs !)
ne doit pas éternellement se prétendre victime,
même si Israël l’a été, victime, c’est indéniable
(ou alors, justement, c’étaient les Juifs),
et l’est parfois encore (et les Juifs aussi).
Parfois. Pas toujours.
Pas exclusivement.

Quand Israël clame haut et fort qu’Israël a le droit de se défendre,
on peut ne pas avoir honte de penser
qu’Israël dit vrai.
Quand Israël décide “pour se défendre”
d’éradiquer le peuple palestinien,
on peut ne pas avoir honte de penser qu’Israël
a cessé d’être victime,
commet des crimes de guerre,
des crimes contre l’humanité,
et qu’Israël a cessé de se défendre,
qu’Israël ne fait plus que participer,
par vengeance (ce qui n’est pas justice !),
à la grande foire de l’ignominie d’une Humanité
qui cesse d’en être une.

On peut alors penser, sans honte de le penser,
qu’Israël n’a pas plus de dignité
que les Terroristes dont Israël prétend vouloir se défendre.

En assassinant tout un peuple ?


Pas sûr que ce billet ne m’attirera pas quelques inimitiés…



À bientôt ?


PS.: Par “Israël”, il convient d’entendre l’État d’Israël tel qu’il est, mené par les forces assassines d’un gouvernement qui, depuis des années veut ignorer toute existence autre que la sienne dans la région.
Et pour cela n’hésite pas à mépriser, fouler au pied les Conventions internationales et les Droits de l’Hommes les plus essentiels…




La perte de l’oubli

Partages, Révoltes Posted on 22 octobre 2023 20 h 09 min

Il y a cette mémoire-là qui,
outre l’immédiate, outre celle de fonctionnement,
nous sert à ne pas nous rappeler, à oublier,
disent certains spécialistes.

On aimerait qu’ils aient raison.
Et puis non.

Une mémoire pour oublier, ce ne serait pas banal,
ce serait presque confortable,
mais oublier ce que nous vivons,
ou ce qui “se passe”, comme on dit,
c’est une autre paire de manches.

Le matin, je me lève.
Infos.
Elles tentent d’effacer mes cauchemars.

En même temps,
me sont annoncées sur un ton de clip publicitaire,
parce que je le vaux bien,
les pires horreurs,
ça tonne, ça hurle, ça meurt, ça blesse et déchire.

Et des chiffres censés déterminants,
parce que mille morts c’est quand même plus d’info que trente-trois…
Alors trois mille, quatre, cinq…
ça hurle de douleur, ça étouffe d’injustice, ça décapite parfois.
Mais je devrais oublier.
Parce que l’info suivante est là
qui dit que, qui dit qui, qui dit quoi,
qui ne dit rien d’autre
que je dois oublier ce qui me tord les boyaux le matin au lever.

Il y a cette mémoire-là qui,
outre l’immédiate, outre celle de fonctionnement,
nous sert à ne pas nous rappeler, à oublier.

Le scandale, il est là :
on a encore des matins, même les infos ne nous les ont pas tués.
On se lève encore (enfin, couci-couça…).
On se dit qu’on a cette obligation de vivre.
On est des salauds qui ne cherchons qu’à ne pas être concernés.
Ou pas à ce point que.
On a cette petite vie qui ne fait de mal à personne et qu’on ne doit qu’à soi.
Ça ne mérite pas des bombardements.

Rien ne mérite des bombardements.

C’est dans ces matins-là, au moment du lever,
qu’on a le plus la conscience d’étouffer
le cri qu’on devrait pousser.

Je dis ça, mais non.
On se lève.
Et les infos, passées à autre chose,
nous parlent
de la mémoire de l’oubli.

On embrasse au passage un enfant,
on lui dit que tout va bien,
que tout ira bien,
à ce soir, petite chérie.

Et le soir, on rentre.

À la télé, les infos.
Qui nous disent d’oublier.





État des lieux

Partages, Révoltes Posted on 4 mai 2023 17 h 47 min

Vu, dans les rues de la ville,
avant que les agents municipaux
agissent
et viennent effacer,
à coups de Karcher (tiens, tiens…)
les traces
de cette créativité-là,
de cette détresse-là.

Double sens bien sûr
d’un population qui pleure,
assommée de lacrymos,
seule réponse qu’un pouvoir
sourd à ses revendications
songe à lui proposer…

Il fait nuit.

(…)


À bientôt.







La fanfare et le fanfaron

Partages, Révoltes Posted on 1 avril 2023 12 h 12 min

C’est une sorte de fable, d’allégorie.
C’est un peu caricatural peut-être.
Comme l’est la sauvage réalité
qu’elle veut ici métaphoriquement s’essayer à raconter.

Ça commence naïvement.
Comme ceci :

Dès le début,
lors de la première lecture de la partition déjà,
on avait été pris d’un doute.

C’était symphonique, emphatique, grandiloquent le plus souvent,
avec une sonnerie de trompette naturelle
qui revenait, revenait, revenait.
C’était un ré fa sol,
le sol, dans la dernière reprise,
mourant sans jamais de nuance,

et semblant n’annoncer qu’une précoce crise d’asthme…
Plat, mais qui était censé atteindre l’inaccessible.

“Pompier”, avait jugé l’un depuis son pupitre;
“prétentieux”, avait maugréé l’autre, un joueur de tuba;
“du pipeau !”, avait pipeletté une jeune flûtiste;
“jupitérien !”, avaient osé, enthousiastes, en tapant dans les mains,
quelques-uns qu’on n’avait jamais vus aux répétitions.

Rien qu’à la lecture, avant même de jouer, c’était épuisant.
Mais – la vie est ainsi faite parfois – ça en avait emballé plus d’un.
On leur avait tant et tant répété que c’était nouveau
que,
par peur d’avoir l’air dépassés, ils avaient adoré…
Il fallait balayer tout ça qui était l’ancien monde,
les vieux accords, les notes pointées, les soupirs,
les vieilles harmonies, les syncopes
,
il fallait remettre la musique, la vraie, en marche !

Il était dit que, l’avenir,
il faudrait aller le chercher avec les dents,
avec ce nouveau chef à la baguette,
si sûr de lui, si coquet, si entrepreneur, si entreprenant, si intransigeant,
qui se moquait allègrement
de qui, dans l’orchestre, devait se poser là, là, ou là
(ou lalala lala…)
“À gauche ? À droite ? C’est comme vous voulez !
La gauche, la droite, ça n’existe pas !”
hurlait-il, exalté, les bras au ciel, le menton conquérant…
“Non, pas là ! mettez-vous un peu plus à droite, si vous voulez bien.
Encore un peu plus ! Voilà, c’est bien comme ça.”


Donc,
lors de la première lecture, j’y reviens,
trainaient déjà au fil des mesures et des dissonances prétendument modernistes,
des discordances, des duretés, des empêchements.
Et pourtant,

allez savoir comment, par quelle sombre magie,
ils avaient réussi,

le chef à la baguette et un aréopage de conseillers très chers payés,
à en faire une musique,
tonitruante certes,
mais dont on allait devoir se contenter,
et dont il était prévu
que nous serions les exécutants.

C’est comme ça qu’on nous avait présentés :
des exécutants.

Cette musique, donc,

c’est eux et personne d’autre, aimaient-il à répéter,
qui l’avaient conçue.
Habitués des fausses notes,
ils étaient indifférents aux accords, aux désaccords,
aux harmonies, aux disharmonies…
Ils avaient décrété qu’ils connaissaient la musique.
Ils n’en appréciaient en fait que celles à deux temps,
le plus souvent militaires,
qui sont celles de l’ordre, de la marche en avant,
de la retraite mal consentie.
Du reste, jamais cette musique-là, la leur, ne battrait en retraite,
clamaient-ils un peu plus que souvent.

Bientôt, dans l’orchestre, des voix s’élevèrent,

qui craignaient les pires cacophonies,
mais il était déjà trop tard.

Écrivant ces mots-là,
je me rends compte que tout semblait dit,
que le maléfique chef d’orchestre dirigerait son orchestre
sans tenir compte de l’orchestre,
préférant sa propre partition (pas très ragoûtante)
à celle à laquelle il avait juré de conjuguer son talent qu’il estimait immense
le jour ou l’orchestre l’avait,
en se pinçant le nez,
préféré à sa tête, lui,
plutôt qu’une folklorique tambourinaire
qui hurlait (encore) plus fort que lui.

La musique ne se fait pas sans âme.
Ça, les initiateurs du nouveau monde, de la “nouvelle” musique
semblaient l’avoir ignoré.
Elle ne se fait pas non plus sans musiciens, je veux dire sans “instrumentistes”.
Moins encore contre eux.

Le grand chef avait beau gesticuler,
assumer (mot qu’il chérissait et dont il abusait) son anxieux autoritarisme,
une fronde, dans l’orchestre, petit à petit pointait.
On ne supporterait pas plus longtemps les hitlérismes
de celui qu’on appelait avec ironie maintenant
“Le Président”…

Faute d’intelligence,
faute d’humanité,
faute de sincérité aussi, de la plus élémentaire humilité,
faute d’empathie, d’écoute, de capacité à s’inventer,

le Maestro, empêtré dans sa brutalité,
ne comprit jamais que la messe (ce mot lui va si bien !)
était dite.

Les uns après les autres, les musiciens, meurtris, quittaient le navire.
Les cuivres en premiers,

puis les bois,
puis les percussions s’égaillèrent.
Tous partirent.

Ne restèrent plus que quelques aveugles thuriféraires

qui continuaient de taper dans les mains et d’y croire,
à cette musique et à son militaire.

La clique s’était dissoute.

Quelques fanas un peu poussifs persistaient à faire la claque.
Et le grand chef dut, au bout du compte,
prendre ses cliques et ses claques (clic-clac).

La musique pouvait reprendre ses droits.

Avec des musiciens, cabossés peut-être,
mais quel plaisir ce fut de les entendre à nouveau respirer !

La lutte, en même temps que la musique, avaient eu peur.
Dans les rues, on se remit à chanter Bella ciao, bella ciao, bella ciao ciao ciao.
Les musiciens n’étaient pas les derniers à être soulagés
,
ils allaient pouvoir ré-inventer l’orchestre.
Un orchestre sans chef, peut-être.

On les embrasse.



À bientôt ?



Mi-litant mi-sérable

Partages, Révoltes Posted on 12 février 2023 17 h 28 min

Ça y est, on bat le pavé.
Pour réveiller le printemps,
pour brûler les sorcières.

Partout, sur les calicots, les pancartes,
des mots pas heureux,
des mots en rage, fatigués mais en rage, en rage fatiguée.
Des mots qui font le boulot primaire des mots
et qui consiste, on l’oublie trop, à ne pas se taire.
Alors, les mots, quand ils en prennent conscience,
s’inventent des poumons pour accompagner le cœur
et hurlent que non ! on ne nous la fera pas, cette injustice-là.

Cette injustice-là, c’est cette histoire de “retraite
qui agite la France aujourd’hui
et pas, comme disent d’incertains,
d’autre pays.

Parce que, personne ne doit l’ignorer,
Les Français sont des fainéants.

On connaît ces rengaines qui puent.
Le “pouvoir” nous les serine :
La France est le plus beau pays du monde, c’est évident,
mais les Français sont des veaux
(dixit Charles de Gaulle, Président de la République qui a cessé de nuire),
des Gaulois réfractaires
(dixit Macaron Premier, pâtissier à Amiens qui n’a pas cessé de nous emmerder)…

Donc, Veaux et Gaulois, nous battons le pavé,
histoire de – merde ! – ne pas se laisser écraser,
vous voyez un peu ?
Une manif, quoi.
Avec des militants, avec des mômes de militants,
avec des exaspérés,
avec des qui tirent le diable par la queue, et c’est souvent pour ça qu’ils sont exaspérés,
avec des bobos (ben oui, pourquoi ils ne seraient pas là, les bobos ? valent moins que les autres ?),
avec des papis et des mamis et des amis,
avec quelques élus aussi qui ont décidé de faire le job, c’est pas fréquent, mais oui,
avec tout ce que la région d’ici compte de mécontents
et qui ont pu ne pas aller se taire ce matin au turbin…
Des poignées, bien plus que des poignées,
d’indésirables.

64 au lieu de 62 !
Un score de basket pour une défaite sociale !
Mais est-ce bien le sujet ?

Limiter la révolte “contre la réforme
à cette seule question-là (celle de la durée),
c’est donner du grain à moudre aux éblouis du travail,
du mérite et de l’ascenseur qui n’existe pas,
et qui prétendent encore,
que c’est dans la fatigue, dans l’épuisement,
que l’homme se déploie,
qu’il a sa seule raison de vivre
(oubliant que le travail a été et est de tout temps un mode d’oppression / soumission).

Travailler plus,
insupportable credo d’une caste qui n’imagine pas
que le travail puisse être un choix,
un choix dont le travailleur est seul maître.
Ou alors c’est l‘esclavage, je me trompe ?

On bat le pavé.
Pour réveiller le printemps,
pour brûler les sorcières.

Des banderolles, des pancartes, des calicots.
J’en découvre un, de calicot, insultant, affligeant.
Désolé pour lui.

Plus près, une jeune femme, un peu devant, sur une pancarte trop petite,
a recopié ceci :

“La bonté est de toutes les qualités morales, celle dont le monde a le plus besoin, or la bonté est le produit de l’aisance et de la sécurité, non d’une vie de galérien. Les méthodes de production modernes nous ont donné la possibilité de permettre à tous de vivre dans l’aisance et la sécurité. Nous avons choisi, à la place, le surmenage pour les uns et la misère pour les autres : en cela nous nous sommes montrés bien bêtes, mais il n’y a pas de raison pour persévérer dans notre bêtise indéfiniment.”
Bertrand Russel 1932.

Songer à aller l’embrasser.

La manif continue, serpente.
Il y a comme une sorte de soleil dans le ciel.
Il fait un peu moins froid.
De la musique.

Trouver les moyens de refuser.
Réfléchir.

Je me souviens :
Je ne veux pas perdre ma vie à la gagner.

Pas tout à fait inutile.



Directeurs de casting de la précarité

Partages, Révoltes Posted on 4 février 2023 15 h 42 min

Directeurs de casting de la précarité

Ce titre n’est pas de moi.
Pas plus que le texte qui suit.

Simplement, suffoquant parfois
sous les émotions que nous propose
ce dont on aimerait parler ici, écrire,
les mots ne relaient pas fidèlement
nos révoltes, nos analyses.
Ils refusent de traduire nos bouleversements.

On a besoin d’un ami, ailleurs,
qui puisse traduire pour nous
ces amertumes, ces désespérances,
voire, plus simplement,
ces constats les plus criants
dont on croit parfois pouvoir se débarrasser.

J’ai décidé de reproduire aujourd’hui ici
un texte de Lola Lafon
paru ce jour dans mon quotidien préféré Libération.
J’espère qu’ils (Lola Lafon et Libération) ne m’en condamneront pas.


Voici :

“Madame,

Nous nous croisons plusieurs fois par semaine; il nous arrive d’échanger quelques mots, laborieusement, parce que nous ne parlons pas la même langue. Tout autour, ce ne sont que pas pressés, trajectoires décidées vers les grands magasins, les bureaux ou les espaces de coworking. Vous, vous restez là, assise au pied d’un distributeur de banque, non loin de la rue Saint-Lazare. Le savez-vous, madame, nous, qui tous les jours passons devant vous, sommes des spectateurs.

Chaque jour, nous jaugeons la véracité, la crédibilité de ceux et celles qui sollicitent notre aide. La misère qui nous convainc est celle qui ne nous incommode pas trop : elle est sans odeur, sans colère, sans discours incohérent, sans haleine alcoolisée. Une misère comme au cinéma. Les stigmates brutaux de la précarité nous éloignent aussi sûrement qu’un excès de beauté ou de santé. Il faut, pour nous émouvoir, avoir l’air «pour de bon» dans le besoin. Nous vous évaluons d’un seul coup d’œil, vous et votre sac à dos gris, votre pull turquoise et cette couverture rouge sombre dans laquelle vous vous emmitouflez quand il pleut.

Vous et votre blondeur peroxydée, ces cheveux teints qui attirent les regards. Un révélateur est un produit indispensable à toute coloration capillaire, vous ne pourriez pas être platine sans lui. Et vous, madame, en êtes également une, révélatrice. Votre présence oxygénée met en lumière les limites de notre compassion. Vos cheveux font obstacle à notre (médiocre) empathie. Nous le déplorons, ce choix cosmétique. Nous vous voudrions tout entière vouée à votre survie. N’est-il pas superflu, ce désir de blondeur, pour une personne comme vous ? Nous statuons sur la façon dont vous choisissez de dépenser vos rares pièces de monnaie, à l’image de ces maris, de ces pères, tout droit sortis des années 50, qui surveillaient le bien-fondé des dépenses de leur épouse.

Il y a quelques jours, vous m’avez poliment refusé une viennoiserie; vous auriez préféré un sandwich. Un passant qui s’apprêtait à vous laisser un Ticket-Restaurant s’est offusqué de votre remarque. Sa charité ne vous supportait pas en individu exprimant une préférence, un goût ou peut-être un dégoût. Ceux que celles que nous secourons, nous les voudrions redevables, reflets flatteurs de notre sollicitude, emplis de gratitude dès que nous faisons le moindre geste envers eux. En photo, un révélateur est un «bain chimique où l’on trempe le cliché pour faire apparaître l’image encore invisible». Vous avez beau être à terre, madame, vous nous regardez droit dans les yeux et nous renvoyez notre image : celle de contrôleurs traquant l’arnaque, vérifiant qui la mérite bien, sa piécette.

Dans un monde où nous nous sommes résignés à élire, faute de mieux, des hommes politiques que nous conspuons, ce triste pouvoir-là, nous nous y accrochons : celui d’évaluer. Il y a quelques semaines, lors de la cérémonie des Golden Globes, Cate Blanchett, lauréate du trophée de la meilleure actrice, a proposé qu’on en finisse avec les prix, une «hiérarchie patriarcale» qui oppose les comédiennes les unes aux autres. Si l’industrie hollywoodienne songe à renoncer à ces cérémonies, pour nous, il n’en est pas question. 

Tous les jours, que ça soit sans enthousiasme ou avec empressement, nous répondons à des enquêtes de satisfaction et distribuons les bons et les mauvais points. Ce chauffeur de taxi était-il aimable ? Notre enfant a-t-il un haut potentiel ? Et ce médecin, efficace ? Ça n’est pas tant notre avis que l’on sollicite, que notre goût de la sanction, du classement, que l’on excite. S’il existait une application qui vous évaluait, madame, vous seriez assurément très mal notée. Comme elle est laide, cette pensée qui nous traverse, fugace, quand on vous voit : si elle a les moyens de se teindre les cheveux… Notre passion pour la «bienveillance» – ce mot dont on se gargarise à longueur de post- Instagram et d’ouvrages de développement personnel – trouve sa limite. Mais quand, à quel moment sommes-nous devenus ces connaisseurs blasés, des directeurs de casting de la précarité ?Des spécialistes de rien qui estimons tout, et vous aussi, madame, comme vos cheveux. Demain encore, nous passerons devant vous, rapides et affairés. Mais nous n’allons nulle part, sans doute le savez-vous ; nous fuyons, terrorisés à l’idée de trébucher, de faillir et de perdre.”


Comme j’aurais adoré l’écrire, ce texte.
Penser comme lui ne suffit sans doute pas.
Mais voilà.

Bonne lecture à vous.



À tout bientôt ?



Rendez-nous les couleurs…

Amis, confluences…, Partages, Révoltes Posted on 16 janvier 2023 17 h 55 min

Rendez-nous les couleurs que vous nous avez volées pour vos affiches de Coca-Cola…
hurlaient Allen Ginsberg, Kerouac, et Burroughs, bref, la Beat Generation.

Ça date ?

Bien moins que Stefan Zweig qui s’interrogeait en 1925 déjà :
“D’où provient cette terrible vague qui menace d’emporter avec elle, tout ce qui est coloré, tout ce qui est particulier dans nos vies ?”

Petite excitation franco-française aujourd’hui : le port de l’uniforme par nos jolies têtes blondes (obligatoirement blondes ?) à l’école ? au collège ? au lycée ?
Et bientôt pour sortir en no-boîtes ?

À l’heure où le Pouvoir,
toujours préoccupé des vrais besoins du peuple qui n’en peut plus,
a fait de ce sujet une de ses priorités (une passerelle jetée vers le RN, ça ne se refuse pas),
mon amie Gaëlle Boissonnard,
dont j’ai parfois relayé ici l’une ou l’autre humeur,
édite sur son blog un joyeux billet.
Je vous le propose .

À lire sans peurs.
Les reproches, on s’en fout un peu, non ?


À bientôt !



Ces fausses évidences qui nous sont serinées…

Partages, Révoltes Posted on 20 septembre 2022 17 h 17 min

On ne peut pas accueillir toute la misère du monde.
On l’entend sans cesse, cette ritournelle-là,
pas toujours chez les gens bien intentionnés.
Elle nous autorise, semblerait-il, à ne pas réfléchir.

Comme si les pires mensonges,
les pires égoïsmes,
les cyniques calculs,
à force d’être répétés,
pouvaient nous servir de vérité(s), de Bible quasiment.

Notre bonne conscience aurait-elle un tel besoin
d’être en permanence nourrie de certitudes, même fausses ?

Un très éclairant – en même temps qu’important – petit livre,
édité ces jours-ci aux éditions Anamosa*,
nous rappelle, sans confort ni condescendance,
et avec une rigueur intellectuelle qui donne envie de vivre,
nos trop faciles acceptations, suscitées, il est vrai,
par des Pouvoirs qui ne se privent pas de nous manipuler…

On ne peut pas accueillir toute la misère du monde.
Comme le bilan d’un chef d’entreprise
qui compte et recompte ce qui lui reste de stock,
et qui se demande de quoi demain sera fait,
s’il ne va pas falloir, pour préserver son train de vie,
se séparer de l’un ou l’autre de ces travailleurs
auxquels il doit pourtant de n’avoir pas crevé…

On ne peut pas accueillir toute la misère du monde.
Cette sentence de mort avec laquelle il faut en finir,
nous expliquent, à la fois savamment et didactiquement,
Pierre Tevanian et Jean-Charles Stevens
(respectivement philosophe et expert juriste),
nous la faisons nôtre à chaque fois que nous plaçons notre confort
au-dessus de nos capacités de questionnement,
quand en tous cas, il nous en reste.
Il est question d’oubli, organisé par soi-même peut-être,
de la plus élémentaire humanité.
Il est vrai que l’Humanité apprend petit à petit,
mais immensément vite,
à se passer d’humanité.
Il semble en tous les cas que la chose ne lui manque pas,
ne lui manquera que quand elle pourra s’acheter, être consommée,
avec, de préférence, une promo à la clé.

La misère du monde entier.
Nous en faisons très largement partie.
Mais ça – telle est notre arrogance – nous avons voulu l’oublier.

*Anamosa signifie en sauk, une langue amérindienne, “Tu marches avec moi”.
Un très beau programme.





À bientôt ?



Tant de vies gâchettes

Partages, Révoltes Posted on 19 juillet 2022 16 h 27 min

Un mois que je n’ai posé de mots
sur ce tanguant dazibao.

Des choses pourtant auraient justifié
les bavardages, les révoltes, les étonnements
qui nous font nous étonner de vivre.

Alors,
histoire de s’inventer un peu de “rétro-actualité”,
des histoires.

Celle-ci.

Le gars, il a 18 ans.
Il s’ennuie peut-être.
Ou alors il a la haine, comme on dit aujourd’hui.
Mais ça s’explique comment, la haine ?
Il y a mille raisons, c’est sûr, à la “haine”,
mais…

Un jour,
le gars qui a 18 ans
et qui peut-être s’ennuie
se rue, armes en bannière,
il dézingue.
Il tue
tout ce qui bouge.
On dira que c’est comme ça.

Il tue des mômes.
Dix-neuf.
De 9 à 11 ans.
Dans une école primaire,
dans le sud du Texas,
à Uvalde.

Dix- neuf mômes.
Et deux adultes.
(La différence ?)

On est le 24 mai, il est 11.33 heures.

Il s’appelle Salvador Ramos.
Tout le monde s’en fout.
Sauf sans doute ceux qui sont un peu mal à l’aise,
pour qui le nom est important,
et lui trouvent des sonorités étrangères
qui expliqueraient tant et tant de choses,
ça justifierait tant et tant de replis.
Pensent-ils.
Tout le monde s’en fout,
pas des mômes trucidés,
mais du patronyme du connard

Ça vous emballe un rapport d’avoir un nom,
celui d’un gars de 18 ans qui a décidé
un matin de dézinguer.
Surtout si on peut le supposer pas d’ici.
Un latino ou, ce serait encore mieux,
un black.

Tout le monde se précipite.
On a un nom,
on a donc un coupable.
On est rassuré.
Comme dans les séries télé ?


On ne se pose pas la question de comment il s’est armé pour tuer ?
On ne se demande pas pourquoi ?

On trouve ça étrange mais possible.

On dit que c’est devenu comme ça maintenant.

Au passage, on ne se dit pas qu’il y a en amont
des armes qui traînent, qui s’offrent, s’achètent.
Qui prétendent faire la loi,
et que des lois prétendent qu’on en a besoin.

Comme si tuer était une éventualité.


C’est dans cette Amérique-là aussi,
mais ne crions pas haro sur le baudet,
que s’érigent et deviennent lois
certaines régressions.

C’est pas chez nous ?
Non.
Mais ça vient doucement si vite.




J’en termine là pour aujourd’hui
de cette mini chronique
de rétro- actualité.

Demain, ou bientôt, une autre préoccupation,
une autre éventuelle régression.
Je vous en laisse un indice :

.


Belle journée.
Et à bientôt ?




J’ai emprunté au Canard enchaîné (édition du 01 juin 2022) le beau titre de ce billet. L’illustration signée B.S. est elle aussi empruntée à la même édition. Le Canard, je l’espère, ne m’en voudra pas.



L’homme de ma vie, peut-être celui de ma mort.

Révoltes Posted on 25 mai 2022 7 h 00 min



Vu quelque part
en ce doux pays de France.
Ça pourrait être n’importe où ailleurs dans le monde.

Commenter ?
Ou laisser parler le silence au moment de lire ?



Un matin, on se lève

Révoltes Posted on 1 mai 2022 18 h 06 min

Un matin, on se lève,
pas très vaillant, j’en conviens.
C’est un peu souvent comme ça.
Non pas qu’on titube, n’exagérons pas, mais bon.
On quitte le lit et on se trimbale, rien de plus.
Il est tôt encore.
Le soleil à peine pointe le bout de son nez. Plein Est.

On vaque dans l’appartement qu’on tente d’habiter.
Il y a des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches,
comme aurait dit qui déjà ?
Et puis il y a un cœur qui ne sait plus pour quoi il bat,
dès lors que
les fruits, les fleurs, les feuilles et les branches…

La douche. 
De l’eau. 
Éviter la satiété. Trop précieuse.
On se dit que, d’une manière ou d’une autre,
il faut se limiter.
On regarde ce matin le jet d’eau autrement.
(on s’interroge sur le sens du mot trésor)
On se prend à accélérer le mouvement.
On fait vite, mais c’est plutôt bien.

Je dis on fait vite, mais non, on fait bref.
On prend son temps par ailleurs, mais c’est un autre temps,
fait d’autre chose, fait autrement.
L’urgence n’est plus la même,
qui bouleverse nos obsessions.
Des obsessions moins égoïstes ?
En tous cas, plus saines.
Économiser les biens qui nous sont donnés.
L’eau, tout ça.

Un ami me disait un soir où on n’avait plus rien à perdre
(on s’était dit déjà les mille choses qui ne servent à rien
sinon à un peu se réchauffer) :
un homme qui n’a plus faim ou soif devient crétin.
Je me suis brièvement demandé si ce ne serait pas bien
d’avoir soif et faim.
Ou s’il ne fallait pas devenir Africain.
Provocation ?
Tentation nihiliste ?
Envie, surtout, de ne pas me contenter.
Au risque de la honte ?
Pas de réponse. Silence.

Trouvé au hasard d’une lecture de Libé, l’autre jour

Donc, la douche.
Sortir de la douche.
Éviter le miroir.

On allume la radio
(j’écoute encore la radio, vous dire ma déliquescence !)
Des nouvelles qui ne servent à rien.
Plus personne ne croit ce qui est dit à la radio.
Aujourd’hui,
c’est la téloche qui prétendument dit les vérités à vingt heures.
Plus certainement (et plus fallacieusement encore),
les bibles hystériques des réseaux sots.
Les vérités, faut dire, ne sont pas très à la mode.
Réfléchir ?
Pas dans l’air du temps non plus.
Il nous est suggéré d’éviter.
On pense pour vous, merde !

Là, ce matin,
au sortir de la douche,
avant le p’tit déj, café équitable,
après l’annonce de la mort de Régine
(tremblement de terre culturel à la une quand même !)
on apprend (faits divers) que l’Inde, sous 50 degrés,
dégouline de la transpiration
de ceux qui n’ont pas les moyens de s’offrir la clim (devinez qui)
et qui souffrent, souffriront et mourront dans pas trop longtemps.
La radio n’est pas là pour nous faire réfléchir !
Elle ne nous dit pas que les femmes et les hommes
qui meurent là sont “distraitement” assassinés.
Son problème n’est pas là.
Elle veut qu’on sache, c’est tout. Point-barre.

On nous informe, on n’analyse pas, on cite, on répète, on déclare.
Vous comprenez ?
Elle est là pour sa petite musique de bonne conscience et d’ennui, la radio,
avec ses airs de vous à moi.

Régiiiiiine !

Je dis “la radio”, mais je pense “cette radio-là”.
On pourrait en imaginer une autre, mais non.
Régine est morte donc. Elle avait quatre-vingt-douze ans.
C’est un peu dans l’ordre des choses, non ?
Mais non ! c’est une info !
On pleure ?
On a le droit, bien sûr de pleurer.
Vous n’allez quand même pas nous empêcher de pleurer !

Mais ces Indiens qui seront sans doute encore de jeunes enfants
quand les canicules dont l’homme est responsable les étoufferont,
c’est l’ordre des choses ? dites-moi.
On aurait pu en faire un sujet à la radio.
Je me trompe ?
Le sujet n’est pas là. Il n’intéresse pas la radio.
Ça risquerait de nous révolter, tous ces indiens sacrifiés
sur l’autel d’un capitalisme qui, l’heure venue, saura se protéger.
La question ne se pose pas non plus de savoir si on les pleurera.

Car oui, les riches, et ceux qui veulent l’être à tout prix, s(er)ont à l’abri.
Ils pourront continuer à prétendre faire ruisseler sur les pauvres leurs richesses,
comme l’affirment de cyniques théories néo-capitalistes,
afin d’améliorer les conditions de vie des démunis.
Un mensonge permanent censé justifier toutes les inégalités du monde.
En polluant encore et encore ?
En engageant chaque jour plus d’esclaves à la mode nouveau monde ?

Les injustices ne manquent pas de ressources.
Tout va bien.

Et, merde ! a-t-on encore en nous les moyens de nous révolter pour d’autres ?

Régiiiiiine !

Un matin, on se lève,
on allume la radio.
Dans l’appartement,
il y a des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches.
On croit que ça nous est dû.

Et puis il y a un cœur qui ne sait plus ni pourquoi ni pour quoi il bat,
dès lors que
les fruits,
les fleurs,
les feuilles
et les branches…

Bon, je vous laisse. Je suis fatigué.
Belle soirée à vous !

À bientôt ?




Peut-être était-elle à 80 ans un danger pour des gendarmes armés jusqu’aux dents ?

Révoltes Posted on 10 décembre 2020 16 h 37 min

On s’en posera ironiquement la question.
Ironie adressée au(x) gendarme(s) assassin(s), non à Zineb Redouane, 80 ans donc,
défigurée, puis décédée à l’hôpital, des suites de ce qu’il n’est pas autorisé
aujourd’hui d’appeler une bavure, ni une violence policière,
mais qu’il est convenu de qualifier de “simple accident”.
Dégât collatéral, quoi. Dégagez, y’a rien à voir.

Retour, sans plus de commentaires, les images suffisant, sur les faits, ici :



À chacun de se faire une idée.
À chacun sans doute aussi, de choisir avec soin sa révolte.
À chacun de tenter de se poser les bonnes questions.

Tout cela est-il bien normal ?

Répondre à des questions qu’on ne me pose pas n’est pas mon objectif.
Interroger, m’interroger, c’est tout autre chose.



À bientôt ?




Et Macaron Premier de s’exclamer…

Révoltes Posted on 30 novembre 2020 18 h 02 min



Et Macaron Premier de s’exclamer, à de multiples reprises,
qu’il ne saurait être question de violences policières dans un État de droit,
qu’en prononcer même l’éventualité serait une insulte à cet État de droit…

Michel Zecler après qu’il a eu l’audace, un soir, de rentrer chez lui.



Il n’y en aurait donc pas chez nous, de violences policières ?
Pas dans notre belle France ?
Ou bien, dangereux syllogisme,
puisqu’il y en a (et de plus en plus nombreuses),
cette si belle France a-t-elle cessé d’être un État de droit ?

Il suffit de penser, de réfléchir, je veux dire…
Faire le compte des coups,
des gardés à vue,
des humiliés,
des blessés, des visés, des tués (oui !),
des roués de coups
parce que rien ou pas assez,
parce que trop noirs,
parce que pas d’accord,
trop opposés,
trop envie de vivre.

Il n’est peut-être pas inutile de se rappeler
que les autoritarismes naissent toujours
de l’éclat radieux du refus d’obéir à ce pour quoi ils ont été élus par ce peuple que,
soudainement, ils méprisent, et veulent écraser.
Et écrasent.

Jusqu’à quand ?

Quand une poignée de flics sur-armés s’en prennent à un homme
parce qu’il a le tort d’être cet homme-là (nègre et toutes ces sortes de choses),
on ne peut que se rendre compte que ces flics-là,
élevés dans le mépris des moindres considérations humaines et des lois,
font l’ignoble travail qu’on attend d’eux,
regardant en même temps le ciel et les cotes de popularités de leur(s) commanditaires
… qui montent, montent et montent encore.

À mesure que des femmes, des hommes morflent.
Jusqu’à quand ?



Dress Code

Et ceci ?, Révoltes Posted on 24 novembre 2020 13 h 48 min


Étrangement déguisés,
ces hommes qui ont
– comme il nous est dit –
pour mission de nous protéger, non ?

Lors d’une manifestation des gilets jaunes, dans le quartier de La Défense, le 8 avril 2019. Photo Émilie Royer


La question qui se pose,
c’est pourquoi vouloir obliger les rédactions des quelques journaux
qui tentent encore de nous informer
de flouter les visages de ces tendres gardiens de nos tranquillités ?

Pour ne pas qu’on les reconnaisse ?
Ils ne sont pas encore assez anonymes,
assez méconnaissables ?

On rêve !
Et puis, pourquoi ne reconnaîtrait-on pas nos héroïques bienfaiteurs
à l’heure où on aimerait tant les remercier ?

Mystère.
Ou alors je n’ai pas très bien compris…



Des bouteilles à la mer quand on craint qu’il n’y ait plus de mers…

Et ceci ?, Révoltes Posted on 3 novembre 2020 16 h 12 min

03 novembre 2020.
Élection présidentielle américaine.
Un espoir. Sans commentaire.
Le commentaire est dans l’espoir…

Mon amie Gaëlle, m’adresse ceci, reçu d’une autre,
qui l’a sans doute reçu d’une autre encore….
Sûr qu’on ne sera pas les seuls.
Mais ça fait du bien.
Sauf à imaginer le pire, demain.
Et puis après…

Nous verrons.





Le bruissement étouffé de l’émotion, le degré zéro de l’information

Partages, Révoltes Posted on 1 septembre 2020 18 h 11 min

J’emprunte volontiers ici ce double titre plagié de deux essais retentissants de Roland Barthes.
(“Le bruissement de la langue”, d’une part, “Le degré zéro de l’écriture”, par ailleurs).
Mon emprunt s’arrête là et n’a valeur ni de comparaison ni de référence,
si ce n’est celles, exclusivement musicales de la langue.
Les mêmes mots donc, ou à peu près,
pour dire, dans des syntaxes différentes,
des choses que, pour sûr,
Roland Barthes aurait traitées avec un tout autre talent,
si tant est qu’elles eussent été dans le champ de ses préoccupations.

Aujourd’hui n’étant pas hier, ce ne fut pas le cas.

Je veux parler ici d’un essoufflement.
Un de ceux qui nous font oublier de nous révolter.

Hier encore, on serait descendu(s) dans la rue,
on se serait agité(s), on aurait donné de la voix,
on aurait défié quelques coups de matraques,
tout ça.
On aurait été des milliers à hurler notre indignation,
à hurler
et répéter encore et encore que
ça ne peut pas se passer comme ça !

Mais non.

Il y a une usure qui nous fait,
par épuisement sans doute,
par lassitude en tous cas,
parce que, aussi,
notre conscience n’est plus le nerf de la petite guerre que nous menons,
il y a cette usure donc,
qui nous a chloroformés de décisions venues d’ailleurs…


Il y a cette usure qui nous fait omettre de regarder autre chose
que nos doigts raidis sur nos azerty,
ailleurs
que dans les brumes de nos canapés,
ailleurs que dans les endormissements auxquels nous sommes
“pour notre bien” tous conviés.

Mais quoi ?
On ne réagit pas.
La presse en parle à peine.
Plus préoccupée de bla-bla que d’humanité.
Silence. Ou à peu près.

Naît une indifférence dont on connaît la creuse philosophie
et qui murmure sans jamais de cesse :
À quoi bon ?

Merde, merde, merde !

Pour info :

L’avocate turque Ebru Timtik
après 238 jours de grève de la faim
est morte dans les geôles turques
à 42 ans et 30 kilos.
Son dé
lit : être opposante au régime.
Les raisons (délirantes) de sa “condamnation” :

Appartenance à une organisation terroriste

Erdogan s’est levé tôt ce matin,
s’est rasé, a regardé sa montre.

A peut-être lu (re-lu ?) “La Fête au bouc
de Mario Vargas Llosa.
Soulagé
?
Pas de quoi.


Téléchargez gratuitement ici l’article de Valérie Manteau dans Libération du 04/09/20.




D’une souffrance l’autre

Partages, Révoltes Posted on 20 août 2020 11 h 58 min



Violences conjugales :
146 femmes ont été tuées en 2019,

un chiffre en hausse de 25% en un an



Titre accrocheur, titre sans profondeur,
titre tristement vendeur qui,
menotté à la sécheresse comptable des chiffres,
ne dit rien d’une réalité.
Titre d’une presse qui ignore la chair, qui ignore l’os,
parce que, aliénée au seul constat,
elle s’est appauvrie au point, aujourd’hui,
de n’être plus que “presse-purée”…

Et pourtant.
146 femmes.
146 femmes
(mais il n’y en aurait qu’une que le scandale déjà mériterait qu’on s’en révolte,
qu’on s’interroge, qu’on le clame, non ?)

Violences conjugales.
On aimerait renvoyer cette expression à l’état surréaliste d’oxymore.
Mais non.
Information qui m’estomaque. Comment ne pas ?
Images de blessures,
de bleus à l’âme et ailleurs,
de coups étalés, tatoués à vie sur les peaux,
qui scarifient les chairs
jusque dans les os brisés.
Images définitives aussi de corps sans vie, nés de violences presque exclusivement mâles…
Images d’enfants en détresse éternellement,
cherchant chez des mères disloquées la raison de cette injustice assénée.
Et qui ne peuvent pas comprendre.
Ne pourront jamais.

Voilà de quoi, aujourd’hui, je voulais faire la matière de ce billet de fin de congés, si tant est qu’il y en eut.



Les circonstances en ont décidé autrement.
Mais je ne quitte pas pour autant le monde de la violence.
Ni celui des femmes (en tous cas de l’une d’entre elles).

Lene Marie Fossen – autoportrait

Car il y a cette autre violence faite – majoritairement – aux femmes.
Et, principalement, aux femmes jeunes.
L’anorexie.


J’ai été foudroyé l’autre soir par la découverte d’une immense artiste morte en 2019,
à l’âge de 33 ans.
Norvégienne.

Lene Marie Fossen était photographe.
Tout en elle l’était, bien que toujours en devenir.
Artiste, profondément artiste.
Est-ce la maladie qui l’a faite telle ?
Discutes de comptoir qui ne demandent, comme toujours, qu’approbations.

Quelle importance ?
D’autant qu’elle voulait,
bien que sa production fût avant tout autobiographique,
que la malade s’efface derrière l’artiste.

Il y a, chez Lene Marie Fossen,
comme chez Antonin Artaud, évoqué ici même l’autre jour,
(chez Hervé Guibert aussi, sans doute, dans son travail et d‘écrivain et de photographe),
la nécessité d’offrir son corps à son travail artistique,
la braise en même temps que le mâchefer ;
le corps devenant alors à la fois le sujet et le matériau,
l’outil même de la recherche.
Sans impudeur, sans voyeurisme, sans mièvrerie non plus.

Et, qu’on l’entrevoie ou non, sans narcissisme.

Aller jusqu’au bout de la douleur,
se calciner
pour tenter de trouver dans les restes de soi
une vérité
dont on n’aurait pas honte.

Une seule envie,
prendre cette si jeune femme si vieille dans mes bras.
En aurais-je seulement été capable ?
La réponse est dans la question.


Arte consacre à Lene Marie Fossen un film visible ici


À bientôt ?



I CAN’T BREATHE !

Révoltes Posted on 8 juin 2020 9 h 55 min

George Floyd
25 mai 2020
46 ans


N’a tenu que huit minutes, quarante-six secondes
sur le ring de Minneapolis.
Il est vrai que ses agresseurs étaient quatre,
qu’ils étaient armés,
faisaient partie du gang de la police,


et qu’il était noir.



Jusqu’ici tout va bien ?

Partages, Révoltes Posted on 14 avril 2020 11 h 43 min

Rentrer chez soi. 
On est allé acheter une baguette. Deux croissants aussi, peut-être.
Petit déjeuner en amoureux.
Imaginaire.

Se dire que tout va bien. 
Se sentir étrangement soulagé 
de n’avoir pas été interpellé (je devrais dire intercepté),
qu’on ne nous ait, cette fois encore, 
rien demandé d’où on vient, d’où on va, 
ni, si, en plus de nos papiers d’identité, 
on a une preuve du pourquoi on va là en venant d’ici 
et si on est bien celui qu’on prétend être.

Illustration : Roland Topor

Jusqu’ici tout va bien.
On est sorti de chez soi,
mais on s’est posé la question de savoir 
si on pourrait prouver que c’était bien chez soi.
On aimerait cesser d’être tendu, aux aguets.
On n’y arrive pas tout à fait.
Mais de quoi, nom de dieu, se sent-on coupable ?
Coupable de ce qu’on nous reprochera.
Parce qu’on en est là.

On est peut-être sorti d’ailleurs que de chez soi,
de chez une femme aimée, on peut rêver.
Et nous viendrait, calquée en gris, sur notre joie, 
la culpabilité de n’être pas où on en a le droit.
Le droit ?

Je n’avais donc pas le droit,
contrairement à ce qui était dit,
d’aller et venir à mon gré ?
Bien sûr que si !
Eh bien, non.

Liberté conditionnelle.
Seulement et seulement si.
Parce que, dorénavant, il y a des si.

Jusqu’ici tout va bien.
Mais il nous est dit que tout pourrait,
d’un jour à l’autre, basculer.
Alors, méfiez-vous !

On nous menace.
Mais qui donc nous menace ?
Sortir sans un sésame vérifiable est punissable. Et puni.
On nous infantilise.
Mais qui donc nous infantilise ?
A-t-on coché la bonne case sur notre attestation de déplacement dérogatoire (ces mots !) ?
On s’est trompé ? On a changé d’objectif ?
C’est punissable. Et puni.
On nous intimide. On nous humilie.
Mais qui donc ?
Ceux, sans doute, qui nous disent
que c’est pour notre bien !

Pour notre bien.
Leitmotiv prétendument irréfutable.

C’est pour leur bien qu’on sépare les amoureux ?
C’est pour leur bien qu’on isole même les plus fragiles ?
Les vieillards, les démunis, les addicts de toutes natures,
et j’en passe.
C’est pour son bien qu’on confine avec son bourreau la femme violentée ?

Jusqu’ici tout va bien.
On est sorti de chez soi,
mais on s’est posé la question de savoir 
si on pourrait prouver que c’était bien chez soi,
qu’on allait bien où on le prétendait,
que les achats de première nécessité en étaient.
Et si la laisse ne dépassait pas la longueur réglementaire.
Et si nous ne mettrons pas davantage de temps qu’il a été décidé.
Et si ce que nous faisons est autorisé ou interdit.
Par qui ?

On est inquiets.
C’est bien ce qu’ils voulaient.
Mais qui ?

Jusqu’ici tout va bien ?



Rendre aux césars…

Partages, Révoltes Posted on 2 mars 2020 10 h 58 min

Je prends la liberté ce matin de relayer ici la tribune de Virginie Despentes
parue dans Libération ce lundi.
Elle fait suite à la cérémonie des césars de ce dernier samedi.
Pas plus que je ne ferai de commentaire
(mon envie de relayer ce texte a à elle seule valeur d’engagement),
je ne me suis permis de ne changer rien, pour en faciliter la lecture,
à la mise en page originelle.

À vous de voir.




“Je vais commencer comme ça : soyez rassurés, les puissants, les boss, les chefs, les gros bonnets : ça fait mal. On a beau le savoir, on a beau vous connaître, on a beau l’avoir pris des dizaines de fois votre gros pouvoir en travers de la gueule, ça fait toujours aussi mal. Tout ce week-end à vous écouter geindre et chialer, vous plaindre de ce qu’on vous oblige à passer vos lois à coups de 49.3 et qu’on ne vous laisse pas célébrer Polanski tranquilles et que ça vous gâche la fête mais derrière vos jérémiades, ne vous en faites pas : on vous entend jouir de ce que vous êtes les vrais patrons, les gros caïds, et le message passe cinq sur cinq : cette notion de consentement, vous ne comptez pas la laisser passer. Où serait le fun d’appartenir au clan des puissants s’il fallait tenir compte du consentement des dominés ? Et je ne suis certainement pas la seule à avoir envie de chialer de rage et d’impuissance depuis votre belle démonstration de force, certainement pas la seule à me sentir salie par le spectacle de votre orgie d’impunité.

Il n’y a rien de surprenant à ce que l’académie des césars élise Roman Polanski meilleur réalisateur de l’année 2020. C’est grotesque, c’est insultant, c’est ignoble, mais ce n’est pas surprenant. Quand tu confies un budget de plus de 25 millions à un mec pour faire un téléfilm, le message est dans le budget. Si la lutte contre la montée de l’antisémitisme intéressait le cinéma français, ça se verrait. Par contre, la voix des opprimés qui prennent en charge le récit de leur calvaire, on a compris que ça vous soûlait. Alors quand vous avez entendu parler de cette subtile comparaison entre la problématique d’un cinéaste chahuté par une centaine de féministes devant trois salles de cinéma et Dreyfus, victime de l’antisémitisme français de la fin du siècle dernier, vous avez sauté sur l’occasion. Vingt-cinq millions pour ce parallèle. Superbe. On applaudit les investisseurs, puisque pour rassembler un tel budget il a fallu que tout le monde joue le jeu : Gaumont Distribution, les crédits d’impôts, France 2, France 3, OCS, Canal +, la RAI… la main à la poche, et généreux, pour une fois. Vous serrez les rangs, vous défendez l’un des vôtres. Les plus puissants entendent défendre leurs prérogatives : ça fait partie de votre élégance, le viol est même ce qui fonde votre style. La loi vous couvre, les tribunaux sont votre domaine, les médias vous appartiennent. Et c’est exactement à cela que ça sert, la puissance de vos grosses fortunes : avoir le contrôle des corps déclarés subalternes. Les corps qui se taisent, qui ne racontent pas l’histoire de leur point de vue. Le temps est venu pour les plus riches de faire passer ce beau message : le respect qu’on leur doit s’étendra désormais jusqu’à leurs bites tachées du sang et de la merde des enfants qu’ils violent. Que ça soit à l’Assemblée nationale ou dans la culture – marre de se cacher, de simuler la gêne. Vous exigez le respect entier et constant. Ça vaut pour le viol, ça vaut pour les exactions de votre police, ça vaut pour les césars, ça vaut pour votre réforme des retraites. C’est votre politique : exiger le silence des victimes. Ça fait partie du territoire, et s’il faut nous transmettre le message par la terreur vous ne voyez pas où est le problème. Votre jouissance morbide, avant tout. Et vous ne tolérez autour de vous que les valets les plus dociles. Il n’y a rien de surprenant à ce que vous ayez couronné Polanski : c’est toujours l’argent qu’on célèbre, dans ces cérémonies, le cinéma on s’en fout. Le public on s’en fout. C’est votre propre puissance de frappe monétaire que vous venez aduler. C’est le gros budget que vous lui avez octroyé en signe de soutien que vous saluez – à travers lui c’est votre puissance qu’on doit respecter.

Il serait inutile et déplacé, dans un commentaire sur cette cérémonie, de séparer les corps de cis mecs aux corps de cis meufs. Je ne vois aucune différence de comportements. Il est entendu que les grands prix continuent d’être exclusivement le domaine des hommes, puisque le message de fond est : rien ne doit changer. Les choses sont très bien telles qu’elles sont. Quand Foresti se permet de quitter la fête et de se déclarer «écœurée», elle ne le fait pas en tant que meuf – elle le fait en tant qu’individu qui prend le risque de se mettre la profession à dos. Elle le fait en tant qu’individu qui n’est pas entièrement assujetti à l’industrie cinématographique, parce qu’elle sait que votre pouvoir n’ira pas jusqu’à vider ses salles. Elle est la seule à oser faire une blague sur l’éléphant au milieu de la pièce, tous les autres botteront en touche. Pas un mot sur Polanski, pas un mot sur Adèle Haenel. On dîne tous ensemble, dans ce milieu, on connaît les mots d’ordre : ça fait des mois que vous vous agacez de ce qu’une partie du public se fasse entendre et ça fait des mois que vous souffrez de ce qu’Adèle Haenel ait pris la parole pour raconter son histoire d’enfant actrice, de son point de vue.

Alors tous les corps assis ce soir-là dans la salle sont convoqués dans un seul but : vérifier le pouvoir absolu des puissants. Et les puissants aiment les violeurs. Enfin, ceux qui leur ressemblent, ceux qui sont puissants. On ne les aime pas malgré le viol et parce qu’ils ont du talent. On leur trouve du talent et du style parce qu’ils sont des violeurs. On les aime pour ça. Pour le courage qu’ils ont de réclamer la morbidité de leur plaisir, leur pulsion débile et systématique de destruction de l’autre, de destruction de tout ce qu’ils touchent en vérité. Votre plaisir réside dans la prédation, c’est votre seule compréhension du style. Vous savez très bien ce que vous faites quand vous défendez Polanski : vous exigez qu’on vous admire jusque dans votre délinquance. C’est cette exigence qui fait que lors de la cérémonie tous les corps sont soumis à une même loi du silence. On accuse le politiquement correct et les réseaux sociaux, comme si cette omerta datait d’hier et que c’était la faute des féministes mais ça fait des décennies que ça se goupille comme ça : pendant les cérémonies de cinéma français, on ne blague jamais avec la susceptibilité des patrons. Alors tout le monde se tait, tout le monde sourit. Si le violeur d’enfant c’était l’homme de ménage alors là pas de quartier : police, prison, déclarations tonitruantes, défense de la victime et condamnation générale. Mais si le violeur est un puissant : respect et solidarité. Ne jamais parler en public de ce qui se passe pendant les castings ni pendant les prépas ni sur les tournages ni pendant les promos. Ça se raconte, ça se sait. Tout le monde sait. C’est toujours la loi du silence qui prévaut. C’est au respect de cette consigne qu’on sélectionne les employés.

Et bien qu’on sache tout ça depuis des années, la vérité c’est qu’on est toujours surpris par l’outrecuidance du pouvoir. C’est ça qui est beau, finalement, c’est que ça marche à tous les coups, vos saletés. Ça reste humiliant de voir les participants se succéder au pupitre, que ce soit pour annoncer ou pour recevoir un prix. On s’identifie forcément – pas seulement moi qui fais partie de ce sérail mais n’importe qui regardant la cérémonie, on s’identifie et on est humilié par procuration. Tant de silence, tant de soumission, tant d’empressement dans la servitude. On se reconnaît. On a envie de crever. Parce qu’à la fin de l’exercice, on sait qu’on est tous les employés de ce grand merdier. On est humilié par procuration quand on les regarde se taire alors qu’ils savent que si Portrait de la jeune fille en feu ne reçoit aucun des grands prix de la fin, c’est uniquement parce qu’Adèle Haenel a parlé et qu’il s’agit de bien faire comprendre aux victimes qui pourraient avoir envie de raconter leur histoire qu’elles feraient bien de réfléchir avant de rompre la loi du silence. Humilié par procuration que vous ayez osé convoquer deux réalisatrices qui n’ont jamais reçu et ne recevront probablement jamais le prix de la meilleure réalisation pour remettre le prix à Roman fucking Polanski. Himself. Dans nos gueules. Vous n’avez décidément honte de rien. Vingt-cinq millions, c’est-à-dire plus de quatorze fois le budget des Misérables, et le mec n’est même pas foutu de classer son film dans le box-office des cinq films les plus vus dans l’année. Et vous le récompensez. Et vous savez très bien ce que vous faites – que l’humiliation subie par toute une partie du public qui a très bien compris le message s’étendra jusqu’au prix d’après, celui des Misérables, quand vous convoquez sur la scène les corps les plus vulnérables de la salle, ceux dont on sait qu’ils risquent leur peau au moindre contrôle de police, et que si ça manque de meufs parmi eux, on voit bien que ça ne manque pas d’intelligence et on sait qu’ils savent à quel point le lien est direct entre l’impunité du violeur célébré ce soir-là et la situation du quartier où ils vivent. Les réalisatrices qui décernent le prix de votre impunité, les réalisateurs dont le prix est taché par votre ignominie – même combat. Les uns les autres savent qu’en tant qu’employés de l’industrie du cinéma, s’ils veulent bosser demain, ils doivent se taire. Même pas une blague, même pas une vanne. Ça, c’est le spectacle des césars. Et les hasards du calendrier font que le message vaut sur tous les tableaux : trois mois de grève pour protester contre une réforme des retraites dont on ne veut pas et que vous allez faire passer en force. C’est le même message venu des mêmes milieux adressé au même peuple : «Ta gueule, tu la fermes, ton consentement tu te le carres dans ton cul, et tu souris quand tu me croises parce que je suis puissant, parce que j’ai toute la thune, parce que c’est moi le boss.»

Alors quand Adèle Haenel s’est levée, c’était le sacrilège en marche. Une employée récidiviste, qui ne se force pas à sourire quand on l’éclabousse en public, qui ne se force pas à applaudir au spectacle de sa propre humiliation. Adèle se lève comme elle s’est déjà levée pour dire voilà comment je la vois votre histoire du réalisateur et son actrice adolescente, voilà comment je l’ai vécue, voilà comment je la porte, voilà comment ça me colle à la peau. Parce que vous pouvez nous la décliner sur tous les tons, votre imbécillité de séparation entre l’homme et l’artiste – toutes les victimes de viol d’artistes savent qu’il n’y a pas de division miraculeuse entre le corps violé et le corps créateur. On trimballe ce qu’on est et c’est tout. Venez m’expliquer comment je devrais m’y prendre pour laisser la fille violée devant la porte de mon bureau avant de me mettre à écrire, bande de bouffons.

Adèle se lève et elle se casse. Ce soir du 28 février on n’a pas appris grand-chose qu’on ignorait sur la belle industrie du cinéma français par contre on a appris comment ça se porte, la robe de soirée. A la guerrière. Comme on marche sur des talons hauts : comme si on allait démolir le bâtiment entier, comment on avance le dos droit et la nuque raidie de colère et les épaules ouvertes. La plus belle image en quarante-cinq ans de cérémonie – Adèle Haenel quand elle descend les escaliers pour sortir et qu’elle vous applaudit et désormais on sait comment ça marche, quelqu’un qui se casse et vous dit merde. Je donne 80 % de ma bibliothèque féministe pour cette image-là. Cette leçon-là. Adèle je sais pas si je te male gaze ou si je te female gaze mais je te love gaze en boucle sur mon téléphone pour cette sortie-là. Ton corps, tes yeux, ton dos, ta voix, tes gestes tout disait : oui on est les connasses, on est les humiliées, oui on n’a qu’à fermer nos gueules et manger vos coups, vous êtes les boss, vous avez le pouvoir et l’arrogance qui va avec mais on ne restera pas assis sans rien dire. Vous n’aurez pas notre respect. On se casse. Faites vos conneries entre vous. Célébrez-vous, humiliez-vous les uns les autres tuez, violez, exploitez, défoncez tout ce qui vous passe sous la main. On se lève et on se casse. C’est probablement une image annonciatrice des jours à venir. La différence ne se situe pas entre les hommes et les femmes, mais entre dominés et dominants, entre ceux qui entendent confisquer la narration et imposer leurs décisions et ceux qui vont se lever et se casser en gueulant. C’est la seule réponse possible à vos politiques. Quand ça ne va pas, quand ça va trop loin ; on se lève on se casse et on gueule et on vous insulte et même si on est ceux d’en bas, même si on le prend pleine face votre pouvoir de merde, on vous méprise on vous dégueule. Nous n’avons aucun respect pour votre mascarade de respectabilité. Votre monde est dégueulasse. Votre amour du plus fort est morbide. Votre puissance est une puissance sinistre. Vous êtes une bande d’imbéciles funestes. Le monde que vous avez créé pour régner dessus comme des minables est irrespirable. On se lève et on se casse. C’est terminé. On se lève. On se casse. On gueule. On vous emmerde.”

Virginie Despentes, romancière



Éloge du doute

Et ceci ?, Révoltes Posted on 26 février 2020 12 h 28 min


Il y a cette nécessaire possibilité du doute qui aujourd’hui
– quand bien même on en entreverrait encore la saine nécessité –
se débine.

C’est que, dans ce qu’on nous présente comme le nouveau monde,
les certitudes sont dogmatiques,
et elles seules doivent, semblerait-il, nous guider.
Une nouvelle irréfutable bible, une monarchique liturgie,
des vérités de classe nous sont non pas proposées mais assénées
avec ordre de ne pas en sortir.
Pas une dictature bien sûr, mais une évidente propension à un autoritarisme
qui pourrait s’en révéler l’antichambre.

Il y a dans l’air du temps comme une obligatoire acceptation
de ce qui nous est imposé.

Les idées ont oublié d’en être et sont devenues des faits
qu’on veut déterminés, indiscutables, irrévocables.
Quitte à tordre le cou à la plus élémentaire des analyses,
elles cessent d’être des projections, ne sont plus des sujets de réflexion.
Elles ne se présentent plus que comme d’indéfectibles vérités.
Inutile de vouloir les jauger, en discuter.
Elle sont le fait du Prince et de sa servile cour d’ânonnants
chargés de nous dire et répéter où est dans le bien le mal
et où, par-dessus tout, dans le mal le bien.
Et nous voilà réduits (voudraient-ils) à ce triste catéchisme
de savoir sans renâcler ce qui, selon que le grand maître,
et les petits qui le suivent, sera bon ou mauvais pour nous,
avec pour critères qui décideront de ce bien-être
les ceci leur feraient du bien et les cela du mal.

Aux caniveaux, les questionnements, les interrogations.
Trêve de ces philosophies qui préféreraient aux réponses les questions.

Et si un doute nous vient, immédiatement le voilà suspect.

Parce que la tendance du jour est à la certitude.
Et que celle-ci ne peut nous être inoculée que par les néolibérales contraintes.

Ainsi nous est-il prétendu, contre vents et marées,
que seule une consommation toujours plus gourmande
pourra venir à bout de nos détresses…

On apprend aussi qu’acheter deux voitures sera toujours mieux
que n’en acheter qu’une;
le pire étant, pour sûr de n’en acheter pas.
Deux yaourts plutôt qu’un.
Un smartphone pour en remplacer un autre qui n’en a pas besoin…
Consommer.
Au détriment de la planète ?

Il se trouve qu’insidieusement ou, selon les cas,
avec de gros sabots,
il nous est suggéré que notre modèle
(celui auquel il est bon que nous nous pliions)
génère en lui toutes les vertus.
Et, par-dessus tout qu’il est le seul possible, le seul viable.
En douter serait une hérésie.
Une certitude en boucle assénée.

Et peu importe que ce modèle creuse chaque jour davantage
le fossé qui existe entre les plus riches et les plus pauvres,
puisque c’est au service des plus riches
que travaillent les gouvernements,
impatients que sont leurs dirigeants
de rejoindre leurs rangs.

S’assurer que les pauvres restent pauvres
(voire le deviennent plus encore),
c’est promettre aux très riches de le rester
(ou de le devenir encore plus)
afin, un jour, de pouvoir en rejoindre
la très sélective petite famille.
Au prix d’une définitive inhumanité.


À bientôt ?


Quelques lectures :

Sur le contrôle de nos vies – Noam Chomsky – Éditions Allia
Éloge de l’oisiveté – Bertrand Russell – Éditions Allia
Impliquons-nous (Dialogue pour le siècle) – E.Morin & M. Pistoletto – Actes Sud



Il y a cette image…

Partages, Révoltes Posted on 27 janvier 2020 11 h 17 min

“Un jour, avec amour, on plumera les vautours…”
Photo Cyril Zannettacci pour Libération


Il y a cette image aux relents désespérés d’insurrection.
Il y a cet homme, vraisemblablement jeune encore,
qui se dit qu’il n’a pas le choix, qu’on ne lui en offre plus,
et qui se bat pour s’en inventer un.
Un nouveau, avec quelque part un morceau de soleil.

Il y a cette image d’un drapeau.
Un drapeau, peu importe lequel.
Pas n’importe lequel.
Qu’on ne s’y trompe pas, ce n’est pas le drapeau français,
c’est celui d’une exaspération.

L’homme, vraisemblablement jeune encore donc,
y a écrit, comme une griffe,
Un jour avec amour on plumera les vautours…

Il y a cette question de n’avoir pas le choix qui taraude.
On l’entend un peu partout.
“On n’a pas le choix…”
Il nous arrive même de la lâcher quand,
lors d’une conversation,
on veut lâchement mettre fin au débat.

Le choix, on l’a pourtant.
Et l’homme au drapeau qui rêve de plumer les vautours le sait.
C’est par choix qu’il est là, c’est par choix qu’il exprime sa révolte.
Mais ce n’est pas par choix qu’il est désespéré.
Son désespoir est le nôtre,
et ce désespoir est le choix d’autres
qui volontiers nous prennent pour des billes.

D’autres qui ont décidé, depuis certaine Dame de fer,
qu’il n’y aurait plus de choix.
There is no alternative, clamait-elle en boucle.
Plus de choix d’une autre société,
un peu moins liberticide,
un peu plus partageuse,
un peu moins injuste.

Et on y est, dans cette société sans plus de choix que la réalité violente et clivante qui nous est imposée.

Nous restent les périodiques élections, dites-vous ?

Choisir une fois tous les quatre, cinq, six ou sept ans
et entretemps fermer sa gueule ?
C’est ça, le choix qu’on nous propose ?
Choisir au “moment X” entre quelques représentants d’une identique société, sans alternative,
une démocratie en résidence surveillée,
et puis n’avoir plus à rêver que de les plumer avec ou sans amour ?

Superbe choix, société de rêve, libertés cadenassées.

Il y a cette image.
Le drapeau sera parfois différent.
Mais ce sera toujours celui de l’exaspération.
Celui du choix fait de s’opposer à ceux qui veulent brader nos libertés.
Et les vendre aux plus offrants, les GAFAM sont de très bons clients.

Cette image, on risque de la revoir souvent.
Les couleurs seront autres, le talent du photographe différent.
Et les violences policières qu’elle suscitera plus que vraisemblablement
seront à l’image de notre détresse : sans modération.
Sauf si un miracle…
Peut-on seulement encore en inventer ?



Les migrants croiraient-ils au Père Noël ?

Partages, Révoltes Posted on 6 janvier 2020 17 h 49 min

D’où vient que certain Père Noël, cette année, nous fasse honte ?

Je découvre la dernière et subliminale « pèrenoëlerie »
télévisée et cinématographiée de Coca-Cola,
exercice obligé depuis presque toujours pour le bien-pensant géant d’Atlanta.

On n’est pas déçu.
Toujours les mêmes bons sentiments.
Le Père Noël,
la petite famille middle-class bien blanche, bien comme il faut,
deux enfants bien sûr, et, oh surprise ! il s’agit d’un garçon et d’une fille !
Sourires béats, joies de l’entre-soi.
On attend un invité.
La famille modèle, quoi.
C’est du Walt Disney.
Ça dégouline d’évidence.



Pas besoin de la bande-son, elle dit ce qu’on ne voit pas,
mais que la multinationale veut nous faire croire.
Elle dit sans jamais l’avouer,
semblant s’émouvoir de la situation des migrants,
(le Père Noël lui-même en serait un, sauf que, ceci dit au passage, lui, on l’attend…)
à quel point elle a en elle
le gène de la manipulation,
et qu’il n’est pas honteux de tondre sur le dos des désespérés
la laine qui nous fait progresser
(comprendre : qui nous fait gagner des parts de marché).


Une certaine droite, très à droite, se déclare scandalisée.
Valeurs actuelles (actuelles, tu parles !) juge que Coca-Cola veut,
au travers de cette nouvelle campagne,
et c’est une honte, disent-ils,
favoriser l’accueil des migrants (je crois rêver) !

Ils viennent de quelle planète ces trolls-là pour dire telles inepties ?
Comme des vendeurs d’aspirateurs,
ils posent le pied pour empêcher la porte de se refermer.
Et cette porte, c’est justement celle qu’ils craignent par-dessus tout :
celle qui reste ouverte.
Paradoxe. Entendre sans jamais écouter. Et inversement.
Encore une fois, ils se trompent de combat mais,
ce faisant, ils font bien des dégâts !


Coca-Cola – ni gauche ni droite, donc droite, intérêts financiers avant tout, c’est tout –
n’a que faire des migrants.
Sauf qu’ils sont une belle source d’apitoiement
pour une société dont la multinationale est un des piliers,
ce néolibéralisme à contre-courant de la fraternité
à laquelle veulent nous faire croire les communicants de
la brune et chimique boisson.
Une fraternité, une solidarité désintéressée
qui n’existe que quand il s’agit de vanter et de vendre
un Père Noël
devenu VRP du grand capitalisme
… aux dépends des migrants justement.
Je me trompe ?


Alors, alors,
ceci, que nous vous proposons
pour tenter de dégager du subliminal un cynisme
qui s’offre sans efforts les atours d’une nouvelle morale
mais ne se préoccupe d’aucune éthique…

On a gardé la bande-son.


Sans aucune illusion,
mais sincèrement,
Belle année lucide à vous !



Quoi, ma gueule ?

Partages, Révoltes Posted on 23 décembre 2019 16 h 08 min

Enki Bilal
“Bug”


On n’arrête pas le progrès ? Rassurez-vous, c’est lui qui bientôt nous arrêtera.
Au propre comme au figuré.
À moins, bien sûr, que nous reprenions la main…

Je relaie ici une lettre commune rédigée, sous le titre “Interdisez la reconnaissance faciale sécuritaire”, et cosignée par un grand nombre d’associations – et non des moindres…

Je vous la donne à lire :

Lettre commune de 80 organisations, dont l’Observatoire des libertés et du numérique dont la LDH est membre

Nous, organisations, collectifs, entreprises, associations et syndicats, demandons au Parlement et au gouvernement français d’interdire tout usage sécuritaire de dispositifs de reconnaissance faciale actuels ou futurs.

Nous constatons que de telles technologies sont aujourd’hui déjà largement déployées en France. Outre les portiques « Parafe » présents dans plusieurs aéroports et gares, le fichier de traitement des antécédents judiciaires permet depuis 2012 à la police et à la gendarmerie de recourir à la reconnaissance faciale à partir d’images prises dans la rue par des caméras, ou encore obtenues sur les médias sociaux. D’autres expérimentations ont déjà été menées ou sont programmées.

La multiplicité des dispositifs déjà existants, installés sans aucun véritable encadrement juridique, transparence ou réel débat public, ne satisfait pourtant pas nombre d’acteurs publics et industriels. En se fondant sur le fantasme d’un développement inéluctable de la technologie et sur des arguments purement sécuritaires et économiques, ils souhaitent accélérer et faciliter le déploiement de ces dispositifs, au détriment des conséquences pour nos libertés et notre modèle de société.

La reconnaissance faciale est une technique exceptionnellement invasive et déshumanisante qui permet, à plus ou moins court terme, la surveillance permanente de l’espace public. Elle fait de nous une société de suspect·es. Elle attribue au visage non plus une valeur de personnalité mais une fonction de traceur constant, le réduisant à un objet technique. Elle permet un contrôle invisible. Elle impose une identification permanente et généralisée. Elle abolit l’anonymat.

Aucun argument ne peut justifier le déploiement d’une telle technologie : au-delà de quelques agréments anecdotiques (utiliser son visage plutôt que des mots de passe pour s’authentifier en ligne ou activer son téléphone…), ses seules promesses effectives sont de conférer à l’État un pouvoir de contrôle total sur la population, dont il ne pourra qu’être tenté d’abuser contre ses opposant·es politiques et certaines populations. Puisque l’utilisation de la reconnaissance faciale à des fins sécuritaires est par essence disproportionnée, il est vain d’en confier l’évaluation au cas par cas à une autorité de contrôle qui échouerait en pratique à suivre chacune de ses nombreuses nouvelles applications.

C’est pourquoi nous vous demandons d’interdire tout usage sécuritaire qui pourrait en être fait. De telles interdictions ont déjà été décidées dans plusieurs villes des États-Unis. La France et l’Union européenne doivent aller encore plus loin et, dans la lignée du règlement général sur la protection des données personnelles (RGPD), construire un modèle européen respectueux des libertés.

Il conviendra par ailleurs de renforcer les exigences de protection des données à caractère personnel et de limiter les autres usages de la reconnaissance faciale : qu’il s’agisse d’authentification ou d’identification privée, l’ensemble de ces dispositifs ne sont pas assez protecteurs des atteintes à la vie privée ; ils préparent, et banalisent une société de surveillance de masse.

Nous appelons à l’interdiction de tout usage sécuritaire de la reconnaissance faciale.

Paris, le 19 décembre 2019



Téléchargez la lettre au format pdf (et partagez-la) en cliquant ici.

Visitez le site de la Ligue des Droits de l’Homme (LdH) ici.


Liste des premiers signataires :

Abilian – ACAT France – Access Now – Action Droits des Musulmans – Altairis – Antanak – Article19 –
Association Dédale – Association for Progressive Communications – Association forCivil Rights (ADC) –
Assodev-Marsnet – ATTAC France – Bee-home – BEhAV Consulting & Coaching – Cerveaux non disponible –
CECIL – Cliss XXI – CNLL – Comité local ATTAC du 78 Sud – CREIS Terminal – DAL (Droit Au Logement) –
Electronic Frontier Foundation (EFF) -Emmabuntus – Entr’ouvert – FACil – FAIbreizh –
FDN – Fédération nationale des Arts de la Rue – FFDN – Framasoft – Franciliens.net – Genepi – Génération.s – GISTI – Globenet – Happyculture -Hermes Center – Hoga – Icare (UVSQ) – Illyse – In Memoris Fondation –
Indie Hosters – INP-net – Internet Bolivia – IP Solution – L’Auberge des Migrants – La Boussole – La Cimade –
La Quadrature du Net – Le groupe parlementaire LFI – Le Mouton Numérique – Le Parti Communiste Français –
Les Tilleuls.coop – Ligue des Droits de l’Homme – Lorraine Data Network – Mailden – Mailo –
Mouvement Ecologiste Indépendant – Mycélium – Numericatous – Observatoire des Libertés et du Numérique – Ouvaton – Parti Pirate – PLOSS Auvergne Rhône-Alpes – ReAct – Résistance à l’Agression Publicitaire – ritimo – Root66 – Sherpa – Solidaires Informatiques – Sursiendo (Chiapas, México) – Syndicat de la Magistrature –
Syndicat des Avocats de France – Tech Trash – Technologos – Technopolice – Toile-Libre –
Union Syndicale Solidaires – Usuarios Digitales de Ecuador – Vanoix – Vélorution Paris Île-De-France



Glissements progressifs du mépris (2/2)

Partages, Révoltes Posted on 8 décembre 2019 16 h 16 min

Sagesse ou brutalité ?
L’alternative est proposée comme si elle était une évidence à laquelle on puisse sincèrement se référer.

Qu’en est-il de la brutalité se prétendant sagesse ?
Qu’en est-il de cette brutalité quand
elle ne se vit plus que comme une incontournable manière de penser,
et donc de gouverner ?

Quand la pensée oublie de penser, existe-t-elle ?
Et celui qui ainsi croit penser a-t-il quelque légitimité à prétendre “nous guider” ?

Le pouvoir, aujourd’hui est un Amphitryon qui tour à tour veut séduire et mater.
C’est le fameux “en même temps” qui est le « badge »
de celui qui n’arrive pas à se décider,
mais qui sait comment nous enfumer…

Pour séduire il a sa frêle et faux-derche séduction.
Il ne se contente pas de sa puissance,
il se veut à la fois Dom Juan et Sganarelle. On ne sait jamais…
Il se prétend moderne et ne répète
– parce qu’il se répète un peu plus que souvent –
qu’un médiéval discours fait de supériorités et de clivages.

C’est sa langue qui, parlant bien mais toujours oblique, le révèle.
Et ça donne ces glissements sémantiques
qui font dire à une chose ce qu’elle ne voulait signifier.
Ne pouvait. Mais qu’importe.
Et ça donne ces manipulations vulgaires des valeurs auxquelles
on fait mine de croire (mais pas trop si on y pense).
Et ça donne ce langage muet et sous-entendu,
une langue de bois qui se persuade qu’elle est drôle.

Et, suivant une logique de banalisation chargée de plaire à tous,
un militant des Droits de l’homme devient,
dans cette langue faite de dérision et de mépris,
et de “je sais de quoi de parle”,
et de “ne vous laissez pas avoir”,
un « droit-de-l’hommiste” !
(On a emprunté – est-ce vraiment un hasard ? – à Jean-Marie LePen cette dénomination…)
Substantivisation” méprisante destinée, on le devine,
à dénigrer l’importance des “valeurs” auxquelles on a,
une fois au pouvoir, renoncé.

Et, comme par un effet de dominos,
s’en sont suivies les relativités amenant au cynisme,
d’abord langagier, mais ça ne saurait suffire, de cette dérision affichée :
Les convaincus des droits de l’homme ?
Des droits-de-l’hommistes.
Mépris.
Les inquiets du tiers-monde ?
Des tiers-mondistes.
Mépris.
Les convaincus que la terre est plate .
Des terreplatistes (!)
Mépris.

Croit-on vraiment qu’en humiliant, qu’en abaissant,
on rassemble ?
Le but, sans doute n’est-il pas celui-là.

Sans doute donne-t-il ceci :

Belle découverte à vous !

À bientôt



Glissements progressifs du mépris (1/2)

Partages, Révoltes Posted on 29 novembre 2019 10 h 56 min

Peut-être se sont-ils demandés comment faire de la langue leur plus sûr allié.
Quitte à la soumettre aux caprices de leur ironie,
quitte à lui faire dire n’importe quoi pourvu que ce n’importe quoi les agrée.
Peut-être se sont-ils posés la question de comment faire dire à un mot
tout ce qu’ils méprisent de ce qu’il signifie, de ce qu’il contient de sens. 

Peut-être est-ce dans ce but-là qu’ils ont créé
ces “éléments de langage”,
ces chapelets de mots vidés de tout leur sens
– mais qu’il est bon de répéter à la manière vide des slogans –
et qui sont ceux de la langue de bois faite de copeaux de vérité,
des cendres précoces, rien de plus.

Ça a donné de ces rodomontades qu’on ose à peine rappeler.
Il en est une, emblématique, mais elle n’est que la tête d’un troupeau.
Le 7 mars 2019, Macron, plus sûr de lui que jamais, clame :
Ne parlez pas de répression ou de violences policières,
ces mots sont inacceptables dans un État de droit”

(Des violences policières, de la répression, il y en a à la pelle
sous cette macronienne république.
Et je n’en rappellerai ici ni la récurrence des témoignages ni leur nombre…
Seulement, voilà, les témoignages n’ont, face à la langue de bois,
que si peu de poids…
)

Peut-être que, effectivement, ces mots-là,
dès lors qu’ils témoignent d’une vérité,
sont inacceptables dans un État de droit.
Mais ce ne sont pas eux qui choquent,
ce sont les méfaits qu’ils dévoilent et montrent du doigt
– on leur en sait gré.
Parce que, quoi ? il suffirait de les taire pour que s’en trouve renforcé cet État de droit ?
Et suffirait-il de les prononcer pour qu’on en soit exclu ?
Si oui, c’est qu’il a des pieds d’argile, cet État de droit.

Il y a cette espèce de bouche en cul-de-poule qui prétend ne jamais mentir
et qui a quelque chose du scorpion.
Nos “dirigeants” s’affublent volontiers de ces hypocrites atours-là
quand ils nous assènent ceci ou cela
et que ni cela ni ceci n’est la vérité…

À l’heure où les violences policières sont
– par le biais d’un mensonge déconcertant*,
aussi bien que par une autiste tautologie –
niées
(il ne saurait y avoir de violences policières dans une État de droit.
Nous sommes dans un État de droit.
Donc, les violences policières n’existent pas),
on ne peut que constater que la vérité officielle n’est qu’un enfant
fait dans le dos de la réalité
et qu’il s’appelle mensonge d’État.

La force du pouvoir aujourd’hui
– mais la chose n’est pas si nouvelle que ça, hélas –
est sa cynique organisation.
Il sait qu’il suffit de tourner en dérision ce qui est l’âme des idées
qu’il s’était pourtant engagé, aux seules fins de se faire élire, et qui l’ont fait élire,
à mettre en place. 

Peut-être hélas, la vulgarité aidant, ont-ils (ces gens-là, de pouvoir)
réussi à faire dire à une cohorte de mots
à la fois ce qu’il sont et le mépris dans lequel ils les tiennent.

Et, pour ce faire, ils ont déployé un petit, tout petit arsenal
fait de condescendance, d’indifférence, de cynisme.
Un de ces cocktails dans lesquels ils sont passés maîtres.

Ce faisant, ils ont consciencieusement passé au laminoir de leur arrogance
les plus belles idées, les plus généreuses – les plus irréalistes sans doute aussi
(mais n’est-ce pas la gloire en même temps que la contradiction de l’homme
que de pouvoir s’offrir des idées farfelues ?)



(à suivre)

* Le mensonge en question, c’est celui qui est asséné de manière tellement péremptoire – et fallacieuse – qu’il en vient à déconcerter celui qui l’entend. L’auditeur, en effet, a du mal à concevoir comment on peut proférer des faussetés aussi évidentes et massives en piétinant les règles élémentaires de la logique et du respect des faits – sans lesquelles il n’y a plus de discussion possible – en comptant sur la crédulité du public non-informé.

(merci à Laurent Joffrin du journal Libération pour cette information)




« Un jour j’arracherai l’ancre qui tient mon navire loin des mers. »

Partages, Révoltes Posted on 7 novembre 2019 15 h 55 min

C’est une colère, une colère immense, quasi sismique.
Un texte bref mais sans qu’un seul mot y puisse être ajouté;
je parle de Contre ! de Henri Michaux.

Loin de moi l’envie de jouer aux critiques littéraires.
Le voudrais-je que mon usurpation sauterait aux yeux, même des plus profanes,
tant il est vrai que ce n’est que l’émotion
– et non pas une quelconque science des lettres et des mots –
qui me mène à évoquer ici ce texte, je devrais dire ce refus.

C’est qu’il y a là, me semble-il, dans cette colère de Michaux,
toute rassemblée dans la chair même de chaque mot,
qui jamais n’est que du verbe,
arrachée aux poumons, à la voix qui voudrait vivre,
une révolte qui ne peut que me faire penser – et avec quelle acuité ! –
aux mouvements désespérés qui ébranlent, un peu partout dans le monde,
les arrogantes certitudes des systèmes liberticides imposés aux peuples…

Ce n’est certes pas l’objectif que poursuivait Michaux,
bien plus métaphysique,
mais ma pensée, ici, fonctionne par analogie,
pas par souci d’analyse littéraire.

Qu’on veuille bien me pardonner.

Henri Michaux
Le Silence du monde


Contre ! (*)

Je vous construirai une ville avec des loques, moi !
Je vous construirai sans plan et sans ciment
Un édifice que vous ne détruirez pas,
Et qu’une espèce d’évidence écumante
Soutiendra et gonflera, qui viendra vous braire au nez,
Et au nez gelé de tous vos Parthénons, vos arts arabes, et de vos Mings.
 

Avec de la fumée, avec de la dilution de brouillard
Et du son de peau de tambour,
Je vous assoirai des forteresses écrasantes et superbes,
Des forteresses faites exclusivement de remous et de secousses,
Contre lesquelles votre ordre multimillénaire et votre géométrie
Tomberont en fadaises et galimatias et poussière de sable sans raison.
Glas ! Glas ! Glas sur vous tous, néant sur les vivants !
Oui ! Je crois en Dieu ! Certes, il n’en sait rien !
Foi, semelle inusable pour qui n’avance pas.
Oh ! Monde, monde étranglé, ventre froid !
Même pas symbole, mais néant, je contre, je contre,
Je contre et te gave de chiens crevés,
En tonnes, vous m’entendez, en tonnes, je vous arracherai ce que vous m’avez refusé en grammes.

 
Le venin du serpent est son fidèle compagnon,
Fidèle, et il l’estime à sa juste valeur.
Frères, mes frères damnés, suivez-moi avec confiance.
Les dents du loup ne lâchent pas le loup.
C’est la chair du mouton qui lâche.

 
Dans le noir nous verrons clair, mes frères.
Dans le labyrinthe nous trouverons la voie droite.
Carcasse, où est ta place ici, gêneuse, pisseuse, pot cassé ?
Poulie gémissante, comme tu vas sentir les cordages tendus des quatre mondes !
Comme je vais t’écarteler !


(*) Henri Michaux, « Contre ! », La Nuit remue (1935)

Henri Michaux
La paresse


Henri Michaux
1899 – 1985
photo David Bueno



À bientôt ?



Ceci n’est pas un leurre

Révoltes Posted on 27 octobre 2019 15 h 44 min

C’est une femme qui parle de l’infâme.
Ça nous arrache la tête.
Parce qu’on n’est pas concernés ?
Qui peut prétendre ne l’être pas ?
Et viennent des hontes,
et viennent des regrets de n’avoir pas vu, de n’avoir pas parlé, pas aidé…

Quatre minutes qui nous sont adressées à tous.
Écoutez le froid constat que fait Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des Femmes, sur ce quotidien partagé par de très nombreuses femmes que peu d’hommes acceptent d’entendre (je le crains).


Y réfléchir.



TamTam avait, il y a de nombreuses années déjà, évoqué le problème.

À découvrir ici.

TamTam février 2007

Et ici

TamTam septembre 2010

À bientôt ?



Le syndrome du cyclope

Révoltes Posted on 23 septembre 2019 16 h 21 min

C’est une chose à la fois,
comme si on n’avait d’yeux qu’une cyclope loupe.

Nos aïeux disaient Chaque chose en son temps.
C’était un autre temps.

Ils estimaient,
pas nécessairement à tort sans doute,
que ce serait bien de respirer avant de scruter,
analyser,
commenter,
une à une,
les ombres et les lumières dont on serait, disons, témoins.
Et, pour cela, prendre son temps.
Celui de la réflexion.

Il se trouve qu’aujourd’hui la succession,
l’accélération asthmatique des “choses”
et de ce qui nous mange jour après jour,
et qu’on appelle “l’information”,
ne nous suggère – bien loin d’une réflexion –
qu’une apnée.
L’apnée du constat qui élimine toute éventualité de réflexion.
(“Je l’ai lu”. “Je l’ai vu”. “On dit que”.)

Et c’est une vision sans relief qui nous suggère d’être,
sinon aveugle, sinon cyclope,
au moins borgne.
Et qui nous dit
non plus de prendre notre temps,
mais d’oublier.
Qui nous dit qu’aujourd’hui, ce n’est plus les “migrants”,
qu’aujourd’hui, c’est l’écologie,
que demain ce sera un n’importe quoi d’autre
qui aura remplacé nos vraies angoisses sans rien en soulager,
mais au sein duquel il nous sera demandé de têter.
Quitte à en crever.

Les migrants,
l’écologie,
une économie qui ne soit pas dévolue à une croissance excluante,
qui regarde le ciel et se pose des questions…
c’est possible.

Sauf, sans doute, pour les ventres gras exonérés d’humanité.

On tentera de respirer.



Et puis quoi encore ?

Révoltes Posted on 8 juillet 2019 16 h 12 min

On se demande.

Mais non, en fait, on ne se demande plus. On a tous son petit avis sur la question.
Un petit avis le plus souvent étriqué, empreint de bonne conscience, en forme de slogan.

C’est si expéditif, un slogan (subst. masc. Formule concise et expressive, facile à retenir, utilisée dans les campagnes de publicité, de propagande pour lancer un produit, une marque ou pour gagner l’opinion à certaines idées politiques ou sociales).

On en a beaucoup expérimenté au fil des siècles, des décennies et des années.

Même s’il a pour limites à la fois l’espace et le temps, il peut être dévastateur, le slogan, tant l’homme a du mal à se projeter ailleurs que dans «l’Ici et Maintenant», que dans le «Ça, c’est bien vrai» toujours si rassurant…
Ainsi se souvient-on du monstrueux succès d’un certain Arbeit macht frei.

Il aurait suffit pourtant d’un peu plus réfléchir pour prendre conscience de ce qu’il n’était que circonstancielle manipulation des esprits, qu’il n’était là que pour asseoir une pensée toxique qui refusait de s’avouer et qui, pour cela, s’agitait, se déclamait en boucle.
Le slogan a vocation à vivre en boucle(s).

Déplaçons-le dans le temps, ce slogan (Le travail rend libre) et analysons-en l’intolérable cynisme en période (pas si lointaine et sans doute à nouveau à venir) d’esclavage.
Voyageons dans l’espace et collons-le comme des décalcomanies sur le corps des enfants qu’on fait travailler un peu partout où le monde est pauvre aux seules fins que nos smartphones nous offrent, au-delà de leur illusoire confort, la soumission qu’inconsciemment nous appelons de nos vœux.
Je vous laisse y penser.

Vous me direz que je m’égare. Oui et non.

La pensée traduite en un slogan est une pensée limitée au but qu’elle poursuit avec, pour seule justification, une tautologie (ce que j’énonce est vrai, j’en veux pour preuve que c’est vrai…”)
Les slogans rassurent parce qu’ils épargnent aux peureux d’avoir à réfléchir.
Et ça donne, dans un pays qui affiche une peu trop volontiers « Liberté, Égalité, Fraternité », cette distorsion de la pensée réduite à une vacuité :

« La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde. »

Escroquerie.

Personne, en France, en Europe, ne songe à accueillir toute la misère du monde.
Mais espérer que le monde des nantis prenne en charge une part de la misère de cet autre monde qu’il fait volontiers mourir (par intérêt, par cynisme, par indifférence),

et on sort tout à coup du slogan…

[KGVID]https://usercontent.one/wp/leblog.baobabcreation.fr/wp-content/uploads/2019/08/Violences.mp4[/KGVID]

Amnesty International, dont je relaie ici une vidéo (son téléchargement peut prendre quelques secondes, patientez !), s’attache à aller au-delà des slogans toujours réducteurs.

Les migrants.
Il y a un problème. Il ne faut pas se voiler la face. Mais il n’est pas nécessairement là où on on nous dit qu’il est.
La solution au problème n’est ni de le nier ni de l’expédier par la force, l’iniquité, l’illégalité, l’inhumanité.

Aujourd’hui – par faiblesse des plus forts ? – on ne se contente plus de mépriser, d’agresser, d’étouffer ceux qui demandent notre aide, on les méprise, on les agresse, on les étouffe précisément parce qu’ils demandent notre aide…
Et on condamne dès lors ceux qui veulent s’engager à les aider.

Ci-gît “Liberté Égalité Fraternité » tombé sous les coups de « Délit de Solidarité”.
On regarde ?
On réfléchit ?

On agit ?



Dans la foulée…

Révoltes Posted on 29 mai 2019 16 h 46 min

Il y avait donc cette douzième lettre de l’Alphabet du bon citoyen de Bertrand Russell auquel, depuis quelques semaines, je m’attache, sur ce blog, à proposer une lecture illustrée.

Et cette douzième lettre, est “L comme… Liberté”. Éluard n’aurait pas espéré mieux.

Et la définition, iconoclaste en diable, qu’accole Russel au mot Liberté était (mais on est loin aujourd’hui d’avoir réglé ce problème) : Droit d’obéir à la police.

Ricanement d’anarchiste”, murmure la bien-penssanse, toujours en quête d’ordre des choses, de leur ordre établi en tous les cas.

Il ne serait pas inutile pourtant, du moins l’espère-t-on, d’évoquer aujourd’hui le désordre établi des forces qu’on appelle de l’ordre. Une police chargée de faire régner un ordre, toujours le même, qui est celui d’une classe, toujours la même, mais dont, chaque jour davantage, les citoyens sont amenés à devoir se protéger.


Amnesty International, dont il difficile de nier la rigueur et l’impartialité, propose sur son site un reportage. L’ONG, Nobel de la Paix 1977, introduit ainsi ce reportage :

« Gilets jaunes, histoire d’une répression d’Etat » est le premier documentaire à revenir en profondeur sur les stratégies de maintien de l’ordre et leur cortège de brutalités policières en réponse au mouvement social des Gilets jaunes, lui-même accompagné de violences et dégradations. Un film très fouillé, documenté et inquiétant, dont le propos rejoint nombre de nos préoccupations exprimées depuis décembre 2018.

Le reportage se découvre ici.

Ce serait bien d’y aller se faire une idée.

À tout bientôt pour la suite de l”Alphabet de Russell… ou pour d’autres petites choses.



Entre-soi…

Révoltes Posted on 1 mai 2019 16 h 20 min

À gauche, sur la photo (sur la photo seulement), Emanuel Macron, ci-devant Président de la République française.

À droite le très connu bienfaiteur de l’humanité, j’ai nommé Mohammed ben Salman.

Embrassades. Pourquoi s’en priver ?

Le premier est président de la République française, faute d’être celui de tous les Français. On est bien d’accord, personne n’est parfait.

Le second est l’odieux à qui on doit, depuis ce début d’année, 104 condamnations à mort (une paille !)

Emmanuel Macron, c’est la France, dit-on. Et, par-delà l’Europe.

Et cette Europe, clame avec Emmanuel Macron, qu’elle ne saurait imaginer d’accueillir en son sein des pays qui songeraient encore à appliquer cette loi immonde du Talion qu’est la peine de mort.
Des pays avec lesquels on fait volontiers commerce d’armes…

Ça n’interdit pas de s’embrasser.
Ça n’empêche rien.
Le cynisme, c’est comme ça.
Les mots, vous savez, ne sont que des prunes, sitôt découvertes, sitôt achetées, sitôt mangées, déjà oubliées.

Emmanuel Macron n’assassine personne, merde ! Ce n’est qu’un complice. Qui avale des prunes. Qui abime ce qu’est le désir profond des Français. Et qui, par négligence ou bêtise ou idéologie, tue.

Se méfier du mensonge, se méfier de l’arrivisme, se méfier du “Je” qui prétend qu’il sait.

Plus d’infos ici.

À bientôt ?



Ben tiens… (une parenthèse)

Révoltes Posted on 23 avril 2019 19 h 10 min

Et je découvre (l’importance n’est pas toujours où on pense pouvoir la débusquer) cette info dont j’ignorais ne pas pouvoir me passer.
Et cette “révélation” de je ne sais quelle improbable chanteuse qui semblait aller mal mais qui maintenant va mieux et qui déclare :
Je peux tout à fait faire semblant d’aller très bien”.
Content pour elle.

C’est à la une d’un quotidien qui a eu peur de son importance que je lis ça.

Et, là, tout ce qui respire se mine.
Faire semblant.
Faire semblant d’aller bien.

C’est quand même un peu merdique de lire ça.
Faire semblant.
Ça résonne d’une étrange manière, non ?

Je me trompe ?

Ben voyons.

Je cherche dans cette pensée de haut vol le fifrelin d’importance dont j’ai besoin.

Personne ne peut

Le souci est d’offrir une exigence à la pensée.

Qui pourrait ? Qui peut ?
Sauf peut-être à faire semblant ?



De la lassitude des modes…

Révoltes Posted on 1 mars 2019 14 h 54 min

Il n’y a pas si longtemps, les quotidiens, les magazines, les émissions de radio, les émissions de télé n’en finissaient pas de nous abreuver des lourdes problématiques liées aux migrations (mais surtout, il faut bien se l’avouer, aux migrants)…

Le sujet était à la mode.

Scandale de se dire ça.
Imaginer qu’il puisse s’agir d’un effet de mode !
Ben oui, force est de le constater.

Les détresses migratoires prennent depuis quelque temps moins de place dans nos journaux.
On s’est habitué. Ou quelque chose du genre.

Comme si plus aucune de ces femmes, plus aucun de ces hommes, plus aucun enfant ne se noyaient sous nos yeux, on a oublié (un peu vite) ce réel état d’urgence qui s’appelle humanité, on est revenus à nos quotidiens petits soucis. Et c’est la loupe qui a changé d’échelle. Du plus loin de soi (les migrants du bout du monde), on en revient au plus près (« nos pauvres à nous »). Avant, on peut le craindre, de revenir à soi, exclusivement à soi.

Il y a cette tentation. On peut la comprendre. Peut-on l’accepter ?
Un enfant qui meurt, une femme, un homme, une femme qui tient un enfant dans ses bras ou alors un homme qui la serre et tente de la sauver… Quelle couleur ? Quelle « race”, quelle religion ?
On n’en a pas assez de toute cette immense bêtise-là ?

Nous ratiocinons aux seules fins de nous pardonner nos tergiversations.
Indignes.

Au-delà des modes, l’agonie des migrants continue.
Notre indifférence n’atténue rien de leur souffrance.

Pour s’en convaincre, ceci :

Il faut…

[KGVID]https://usercontent.one/wp/leblog.baobabcreation.fr/wp-content/uploads/2019/08/Comment-l-Europe-et-la-Libye-laissent-mourir-les-migrants-en-mer.mp4[/KGVID]

PS.: tenez compte du fait que la qualité de votre connexion détermine la vitesse de téléchargement de cette vidéo…

À bientôt ?



Au bonheur des dames

Révoltes Posted on 23 janvier 2019 11 h 57 min

Allons droit au but.

Ça se passe dans les deux pays les plus peuplés du monde. La Chine, l’Inde.

Vous êtes une jeune femme.

Vous ne savez pas pourquoi, mais on vous a vendue. Le prix varie entre 3.000 et 13.000 dollars selon votre âge et ce que vous inspirez d’appétence (pardonnez ce barbarisme).

Les clients ? Des familles en quête d’une épouse pour leur fils.

La tractation a eu lieu. 13.000. Vous êtes jeune et jolie.

Et là, on vous enferme. Vous êtes violée de manière répétée : il faut vous mettre enceinte rapidement, il faut un enfant à la famille.

Vous accouchez.

Le reste de votre vie ? Pas grand chose.

On peut vous laisser repartir, contrainte de laisser votre enfant derrière vous, dans sa nouvelle “famille”… Votre vie à vous ? C’est votre problème, non ?

C’est pas beau, ça ?

Depuis des années, la préférence du fils a fait considérablement chuté le nombre de naissances de filles. Tant et si bien que le ratio constaté à peu près partout dans le monde et de manière constante de 105 garçons pour 100 filles, est passé en Chine et en Inde à 120 hommes pour 100 femmes.

Trop-plein d’hommes, déficit de filles, mariages forcés afin de s’assurer une descendance.

Les femmes, encore une fois, paient de leur corps, de leur vie, leur tribut aux traditions qui font de l’homme leur suzerain .

Avortements sélectifs, traite des femmes, violences à leur égard.

Bref, rien de bien neuf sous le soleil.

Pas sûr qu’on s’améliore.

Ç’est en Chine, c’est en Inde, ça ne nous regarde pas !

Ah bon ?

Vous croyez vraiment.

C’est partout qu’on continue à considérer la femme comme un deuxième sexe, indispensable mais négligeable.



On disait donc “Plus jamais ça !”

Révoltes Posted on 17 janvier 2018 14 h 28 min

C’était au siècle dernier. Mais ce n’était pas la première fois qu’on scandait cette même résolution-là. Sans doute, en 1572, après l’horrible Nuit de la Saint-Barthélemy, n’était-ce déjà pas la première fois. Et bien avant cela, depuis que l’homme penche obscurément et périodiquement du côté du loup pour l’homme, les occasions n’ont hélas pas manqué…
Sans doute n’y a-t-il pas eu d’années, de mois, de semaines, de jours sans qu’on ait sincèrement pensé, articulé, affirmé, crié, hurlé ou chuchoté ces trois mots-là :

PLUS JAMAIS ÇA !

On ne cesse de les prononcer, on ne cesse de concocter les massacres, les ignominies qui prouvent qu’encore une fois on est passé à côté de cette volonté-là.
Combien faudra-t-il encore de morts, de viols, d’atrocités perpétrés pour cause d’exclusion d’un peuple, d’une religion, d’une couleur de peau, d’une appartenance à ceci ou à cela ? L’homme ne se lassera donc pas de se croire supérieur à d’autres hommes ?

Les Rohingyas, les Roms, les Juifs, les Protestants, les Musulmans, les Catholiques, les Nègres qu’on n’appelle plus comme ça, mais qu’on continue à traiter comme ça, les, les, les, les… Aucune exhaustivité possible. Seul, de temps en temps, un très momentané essoufflement qui se prétend paix avant la reprise des hostilités…

Amnesty International, entre autres combats, lutte contre l’horreur imposée aux Rohingyas. Presque plus personne ne se scandalise. C‘est bien loin, le Bangladesh, c’est bien loin la Birmanie. Combien sont-ils à avoir été déplacés aujourd’hui ? 700.000, croit-on savoir. 700.000 – peut-être plus – à avoir aux yeux des Boudhistes (vous savez cette philosophie de la Tolérance…), le tort d’être Musulmans. Combien sont-elles (et ils…) à avoir été violés, combien sont-il à avoir été sommairement assassinés, combien sont-ils et elles dont la maison est partie en fumée ?

Amnesty International poursuit sa mission d’information à travers, entre autre, la vidéo que je vous propose ci-dessous de découvrir. N’hésitez pas à la relayer auprès de vos amis. Et que notre indignation soit contagieuse !

[KGVID]https://usercontent.one/wp/leblog.baobabcreation.fr/wp-content/uploads/2019/08/La-crise-des-Rohingyas-expliquée.mp4[/KGVID]

À bientôt ?



Ça va ? Tout va bien ?

Révoltes Posted on 17 décembre 2017 16 h 50 min

Il y a quelque chose de miraculeux dans les rêves d’enfants.

Et ce quelque chose de miraculeux tient principalement à leur temporalité en même temps qu’à leur splendide innocence.

Je rêve donc je suis
, pense l’enfant. Ou plutôt, Je rêve ce que je pourrais être. Ou, si je le rêve, ce que je rêve sera…

Personne ne nous dira jamais à quel point l’enfant n’est que peu dupe de ses propres rêves. Il y a chez lui sans doute un « rêver de » qui, volontiers, se confond à un « rêver à”. La distance entre les deux, il l’invente. Mince parfois, épaisse souvent. C’est son accès à l’humour.
Et, ce à quoi il rêve, il le sait confusément, n’est pas toujours ce dont il rêve. C’est un enfant, un être doué d’une intelligence (au sens de compréhension) qu’il perdra bientôt aux fins de devenir adulte. Faute de quoi, il sera ce qu’on appelle un demeuré, tant au sens littéral que littéraire du terme.

Il y a là-bas, aux États munis d’Amérique, un grand enfant, du style enfant gâté, vous voyez ? du style qui casse ses jouets parce qu’il sait très bien qu’on lui en offrira très vite de plus beaux, qui trépigne et hurle dès qu’on lui dit non, un de ces enfants qui aiment à arracher les ailes des papillons et à brûler les mouches, c’est tellement amusant. Les psys de toutes couleurs et de tous acabits nous ont appris à trouver ça normal. Il nous ont appris à être patients au moins jusqu’à ce que la puberté trouve une solution naturelle à ces cruels amusements.

Il y a donc, là-bas, un grand enfant attardé de soixante et onze ans qui continue de prendre ses rêves pour des réalités et d’arracher les ailes des papillons. Un de ces jouets préférés : interdire. Il croit dur comme fer qu’une chose interdite cesse d’exister. Pire, pour lui, interdire un mot revient à tuer ce que ce mot peut évoquer.
Ne dites plus « réchauffement climatique » et le réchauffement climatique ne sera plus qu’un leurre.

L’homme (?) est un obstiné. Il vient ainsi de décider que seraient interdits (Washington Post de ce 15 décembre) dans les rapports du CDC (Centres pour le contrôle et la prévention des maladies) les sept mots ou groupes de mots suivants : « Fœtus », « transgenre », « diversité », « vulnérable », « prestation sociale », « fondé sur des données concrètes » et « fondé sur la science »

Les transgenres n’existeront plus puisqu’ils n’auront plus, au sens le plus littéral du terme, droit à la parole. Plus de diversité ! Plus de vulnérables, de prestations sociales,… Plus de références à la science.

La disparition du mot “fœtus” interroge.
Le faire disparaître est un avortement auquel sa maman n’a, de toute évidence, pas eu recours. Pas sûr que cette retenue fasse aujourd’hui le bonheur des transgenres, des vulnérables, de la science… ni de la planète qui – n’en déplaise à ce grand enfant gâté aux allures de pervers sexiste et d’inconscient patenté – bel et bien se réchauffe et pose problème à bien des fœtus (oups !) qui ne verront pas le jour, parce que prématurément assassinés.

Ne nous reste, face à l’ignominie, qu’à interdire le nom de ce 45ème Président des États-Unis. Peut-être cessera-t-il d’exister ?

Si seulement.



Quand donc cela s’arrêtera-t-il ?

Révoltes Posted on 20 octobre 2017 15 h 46 min

On continue là la sombre litanie entamée dans le billet Salmigondis.

Cette manière de poser des noms sur des victimes jusque-là anonymes, c’est le quotidien Libération qui en est l’origine.

On peut lire l’ensemble de l’article ici. Les textes sont de Titiou Lecoq.

MAI

Elle s’appelait Noémie. Elle avait 30 ans. Elle était infirmière. Elle s’est disputée avec son petit ami, 31 ans, policier. Noémie a été touchée par un tir dans le dos. Le policier, qui n’était pas en service, avait son arme de fonction avec lui. Il était déjà connu pour des faits de violences sur une ex-compagne. Nailly, Yonne.

Elle s’appelait Marion. Elle avait 41 ans. Elle était la mère de deux petits garçons. C’est son compagnon, Martial, 40 ans, qui a prévenu la police, affirmant qu’il l’avait trouvée morte chez eux. L’autopsie a révélé qu’elle avait été violée et battue. Les voisins ont évoqué des cris, une forte dispute. Le conjoint a été mis en examen pour violences volontaires et viol ayant entraîné la mort. Il s’est pendu en détention. En mars, Marion avait déjà été soignée pour des coups mais n’avait pas porté plainte. Aigrefeuille-sur-Maine, Loire-Atlantique.

Elle s’appelait Nathalie. Elle avait 45 ans. Elle avait deux enfants, de 18 et 22 ans. Elle venait de quitter son compagnon. Il est entré chez elle par la force, avec une arme à feu et lui a tiré dessus à bout portant. Il a ensuite retourné l’arme contre lui. Il est décédé le lendemain des suites de ses blessures. Brignoles, Var.

Elle s’appelait Michèle. Elle avait 38 ans. Elle fréquentait Mourad, 30 ans, depuis trois ans. Elle a été tuée à coups de marteau. Mourad nie être responsable mais il a été vu s’enfuyant de chez Michèle, montant en voiture et partant à toute vitesse. Sa voiture a été retrouvée dans un fossé un peu plus loin. Il a continué à pied et a été arrêté. Lagorce, Gironde.

Elle avait 78 ans. Elle venait de quitter son compagnon et avait emménagé en Dordogne, près du domicile de leur fils. Son compagnon, 80 ans, l’a étranglée avec une écharpe avant de se pendre avec un câble électrique. Le parquet précise qu’il ne s’agit pas d’un «suicide altruiste», «cette dame ne voulait pas mourir». Domme, Dordogne.

Elle avait 48 ans. Elle venait de se séparer de son compagnon, 50 ans. Ils tenaient ensemble un bar-restaurant. Elle souhaitait vendre l’affaire pour reprendre sa part et pouvoir retourner vivre au Brésil, son pays d’origine. Il l’a abattue de quatre balles devant le bar. Eragny, Val-d’Oise.

Elle s’appelait Sadia. Elle avait 47 ans. Son compagnon, Damien, 46 ans, ancien agent communal, l’a abattue de deux balles de revolver dont une dans la tête. Il s’est ensuite suicidé. Ils avaient chacun de leur côté des enfants. Les enquêteurs évoquent une violente dispute et un «contexte alcoolisé» mais on ignore les raisons de cet homicide. Cour-et-Buis, Isère.

Elle avait la trentaine. Elle était serveuse dans un restaurant. Son ex-compagnon, 37 ans, est entré dans le restaurant en pleine journée et l’a poignardée. Il a ensuite poignardé le cuisinier avec qui il soupçonnait qu’elle entretenait une liaison. Chambéry, Savoie.

Elle s’appelait Margaux. Elle avait 29 ans. Elle travaillait comme aide-puéricultrice dans une crèche. Elle avait deux enfants de 5 et 6 ans. Ils étaient présents cette nuit-là, à leur domicile. Mohamed, 29 ans, son compagnon et père de ses enfants, dont elle s’était séparée mais avec qui elle revivait depuis un mois, a débarqué dans la nuit chez un proche pour lui confier leurs deux enfants. Il a lui expliqué qu’ils s’étaient disputés et qu’elle était inconsciente quand il était parti. Il a laissé les enfants et a ensuite pris la fuite. Le proche a prévenu les secours qui ont retrouvé la victime morte avec un sac sur la tête et une cordelette autour du cou. C’était le jour de son anniversaire. Mohamed, qui avait réussi à rejoindre la Tunisie, a finalement décidé de se rendre à la police. La Trinité, Alpes-Maritimes.

Elle s’appelait Claire. Elle avait 35 ans. Elle était secrétaire médicale. Elle avait un garçon de 4 ans. Elle avait disparu de son domicile depuis le 22 avril. Son corps dénudé a été retrouvé par un promeneur le 7 mai près d’une ferme abandonnée. Elle a été tuée par arme blanche. Son compagnon, Simon, 30 ans, a été mis en examen. Il nie les faits mais pour les enquêteurs tout converge vers lui. Cohiniac, Côtes-d’Armor.

La suite, bientôt hélas…



Et ça continue et ça continue…

Révoltes Posted on 7 septembre 2017 16 h 58 min

Suite et, hélas, pas fin, de la sombre litanie entamée dans le billet Salmigondis.

Cette manière de poser des noms sur des victimes jusque-là anonymes, c’est le quotidien Libération qui en est l’origine.

On peut lire l’ensemble de l’article ici. Les textes sont de Titiou Lecoq.

AVRIL

Elle s’appelait Nastasia. Elle avait 18 ans. Elle était groom-stagiaire dans un centre équestre. Elle sortait depuis quelques mois avec Roberto, 38 ans. Il l’a poignardée, chez elle. Un coup à la carotide a été fatal. Longvilliers, Yvelines.

Elle s’appelait Djamila. Elle avait 31 ans. Elle a été retrouvée sur son lit, victime de deux coups de couteau à la gorge et un à l’abdomen. A côté d’elle, les pompiers, qui venaient pour un problème de fuite d’eau, ont trouvé son compagnon, 47 ans, allongé. Il dormait, ivre. Il semblerait qu’il n’aurait pas supporté une infidélité. Alès, Gard.

Elle s’appelait Séverine. Elle avait 29 ans. Elle était mère de deux enfants, âgés de 6 ans et 18 mois. Elle venait de se séparer de leur père, 32 ans. Elle a été battue à mort chez elle. Son ex-compagnon s’est présenté au commissariat, accompagné de leurs enfants, pour se constituer prisonnier le soir même. Il lui avait déjà cassé le nez en janvier dernier. La Plaine, Maine-et-Loire.

Elle avait 35 ans. Elle avait trois enfants de 11, 8 et 5 ans. Les deux petits jouaient ailleurs mais l’aîné était présent dans la cuisine quand son père, 43 ans, a poignardé sa mère. L’enfant s’est interposé et a été blessé. Il a réussi à appeler les secours. Elle était aidée depuis 2014 par l’association SOS femmes 49. En novembre 2015, elle avait déposé une plainte pour menace de mort qui avait été classée sans suite après enquête et confrontation des deux parties. En novembre 2016, elle avait entamé une procédure de divorce. Elle a reçu 24 coups de couteau, principalement au visage et dans le cou. Trélazé, Maine-et-Loire.

Elle avait 35 ans. Elle était «adulte protégée». Ils s’étaient rencontrés à l’hôpital psychiatrique de Rennes. Ils avaient tous les deux également des problèmes d’alcool. Son ex-compagnon, 42 ans, a été retrouvé dans l’appartement de la victime, à proximité du corps poignardé. Elle a reçu 45 coups de couteau, principalement à l’abdomen. Plus d’une vingtaine était mortels. Il avait déjà été condamné deux fois pour des violences contre elle et avait interdiction de l’approcher. Rennes, Ille-et-Vilaine.

Elle s’appelait Alison. Elle avait 26 ans. Elle était en voiture avec son compagnon, 41 ans, employé aux espaces verts, et leur fils de 2 ans. Leur aîné, âgé de 7 ans, n’était pas présent. Ils étaient sur la départementale 47. Ils s’étaient arrêtés sur le bas-côté de la chaussée, étaient sortis de la voiture quand son compagnon l’a poignardée à 11 reprises dans l’abdomen. Un automobiliste qui passait a assisté à la scène et a appelé les secours mais ils n’ont pas pu la réanimer. Son compagnon, encore sur les lieux, a été arrêté. Il était connu de la police pour des faits de violence. Il a expliqué avoir mené durant des années une double vie. Il venait d’accepter de demander le divorce et venait d’emménager chez Alison. Alors que leur situation se «normalisait», elle l’aurait menacé de le quitter. Il dit avoir voulu la menacer. Rombas, Moselle.

Elle s’appelait Danièle. Elle avait 72 ans. Elle était mariée depuis trente-six ans avec Georges, 93 ans. Il l’a tuée avec une arme de poing avant de se suicider. Georges souffrait d’un cancer à un stade avancé. Danièle fréquentait depuis un an une association d’aide aux femmes, l’Apiaf. L’association a expliqué qu’elle avait pris conscience de la violence de son mari qui la tenait enfermée au maximum mais qu’elle ne souhaitait pas le quitter, elle disait que c’était un homme très vieux, pas dangereux. Toulouse, Haute-Garonne.

Elle s’appelait France-Lise. Elle avait 52 ans. Elle avait été conseillère municipale. Elle avait deux filles. Elle était en instance de divorce. Son mari, Paul, 53 ans, serrurier, l’a abattue devant chez elle de deux balles et s’est ensuite suicidé. Haute-Rivoire, Rhône.

La suite bientôt.



Petite suite pas insignifiante

Révoltes Posted on 5 septembre 2017 15 h 01 min

Cliquez, vous verrez…



Sinistre litanie

Révoltes Posted on 20 août 2017 11 h 31 min

Je continue ici le lugubre et hélas lacunaire dénombrement commencé avec le billet “Salmigondis” du 03 juillet et relayé par celui du 19 du même mois. Il s’agit de violences fatales faites aux femmes, vous vous rappelez ?

Cette manière de poser des noms sur des victimes jusque-là anonymes, c’est le quotidien Libération qui en est l’origine.

On peut lire l’ensemble de l’article ici. Les textes sont de Titiou Lecoq.

MARS

Elle s’appelait Hélène.
Elle avait 27 ans et était la gérante d’un centre équestre. Elle a été retrouvée poignardée dans la cour de son établissement où elle vivait seule. Elle a reçu deux coups de couteau au cœur et au poumon. Son ex-compagnon a été mis en examen pour assassinat. Yannick a 45 ans, il est pompier volontaire. Ils sont restés trois ans ensemble et étaient séparés depuis un mois. Il a reconnu être possessif et jaloux. Il a également reconnu la préméditation. Début mars, Hélène avait porté plainte contre lui pour violation de domicile. Il était entré chez elle en cassant une vitre. L’affaire avait été classée sans suite sous condition de remboursement des frais. Trigny, Marne.

Elle avait 44 ans. Elle était auxiliaire de vie dans le collège où étaient scolarisés deux de ses enfants, âgés de 12 et 13 ans. Avec son nouveau compagnon, ils avaient également un petit garçon de 5 ans et demi. Elle a été poignardée chez elle. Les trois enfants ont également été poignardés dans leurs lits. L’homme, 46 ans, boucher-désosseur, s’est jeté sous un train. Dans sa voiture, les gendarmes ont trouvé un texte dans lequel il reconnaît les meurtres. Le couple était en cours de séparation et il ne le supportait pas. Il craignait de perdre son fils. Il avait été condamné dans les années 90 pour violences avec armes à trois ans d’incarcération. Beaumont-lès-Valence, Drôme.

Elle s’appelait Kelly. Elle avait 20 ans. Ce soir-là, elle passait récupérer ses affaires chez son ex, Steven, âge de 22 ans. Ils se sont disputés. Elle a été poignardée à mort. Son ancien compagnon avait également des plaies au couteau. Il a été hospitalisé puis a été placé en garde à vue. Montval-sur-Loir, Sarthe.

Elle s’appelait Julie. Elle avait 43 ans. Elle était secrétaire dans un cabinet dentaire et avait un fils de 13 ans. Depuis plusieurs semaines, elle se sentait menacée par un ex-compagnon. Il avait forcé la porte de chez elle pour la menacer. Elle avait déposé une main courante, prévenu ses amis et voisins et demandé au père de son fils de le prendre chez lui pour qu’il soit en sécurité. L’ex a réussi à entrer chez elle, il lui a donné 53 coups de couteau dont 7 mortels. Il était encore sur les lieux quand les pompiers sont arrivés. Nice, Alpes-Maritimes.

Elle s’appelait Blandine. Elle avait 29 ans. Elle était aide-soignante dans un hôpital. Elle avait une fille de 5 ans. Elle a été retrouvée morte à son domicile, au côté de Pascal, son ex-compagnon, garagiste, 33 ans, décédé lui aussi, une arme à feu près de lui. Selon le parquet, l’homme aurait tué son ex-compagne avant de se donner la mort. Le maire de la commune d’origine de Pascal a dit : «Pascal, que je connaissais bien, était quelqu’un de très doux, très équilibré.» Miramont-d’Astarac, Gers.

Elle s’appelait Nicole. Elle avait 62 ans. Elle a été battue à mort chez elle. Elle avait plusieurs côtes et une épaule cassées et présentait également des traces de coups plus anciennes. Son ex-concubin, 32 ans, a été mis en examen. En octobre dernier, il avait été condamné à six mois de prison pour des faits de violence sur Nicole. Il avait été placé sous contrôle judiciaire avec obligation de suivi. La peine était assortie d’une interdiction d’entrer en contact avec Nicole. Abbeville, Somme.

Elle s’appelait Marcelle. Elle avait 90 ans. Elle était infirmière à la retraite. Son mari, Frédéric, 86 ans, l’a tuée en la frappant avec une casserole. Peu de temps avant, on avait diagnostiqué à Frédéric une maladie d’Alzheimer. Il a déclaré : «Elle a ce qu’elle mérite, je l’ai fracassée». Limeil-Brévannes, Val-de-Marne.

Elle s’appelait Cathy. Elle avait 43 ans. Elle était employée municipale. Elle avait cinq enfants. Elle venait de quitter son mari, 48 ans. Elle est retournée chez eux pour récupérer des affaires. Il l’a étranglée. Hospitalisée, elle est décédée quelques jours plus tard. Fosses, Val-d’Oise.

Elle s’appelait Virginie. Elle avait 41 ans. Elle avait une fille de 13 ans. Elle entretenait une relation épisodique avec Pierre, 45 ans. Il avait déjà été condamné en 2014 et 2015 pour des violences contre Virginie mais il continuait de débarquer chez elle malgré l’interdiction de la voir. Ce soir-là, il reconnaît l’avoir frappée à plusieurs reprises au visage et à la tête. Le lendemain matin, il est retourné chez elle. Elle était inconsciente, ou morte. Il a nettoyé les taches de sang. Il a également donné un bain à Virginie, toujours inconsciente ou morte, et l’a déposée sur le canapé. C’est sa fille de 13 ans, qui rentrait d’un week-end chez ses grands-parents, qui l’a ensuite trouvée, morte. Vaivre-et-Montoille, Haute-Saône.

Elle s’appelait Nicole. Elle avait 47 ans. Elle sortait d’une supérette avec son nouveau compagnon quand une voiture leur a foncé dessus et les a renversés. Le conducteur était son ancien conjoint, Jean-Pierre, 58 ans. Il était sorti de prison depuis deux ans après une peine de quinze ans pour un crime sexuel. Saint-Louis, Réunion.

Elle s’appelait Djeneba. Elle avait 37 ans. Elle s’occupait d’un élevage de bovins. Elle était originaire du Mali où elle avait été vétérinaire puis elle était venue en France en 2008 pour suivre Jean-Paul, 67 ans qu’elle a épousé. Ils avaient trois enfants. L’an dernier, Djeneba a lancé une procédure de divorce suite à des violences conjugales. Une ordonnance de protection avait été mise en place interdisant à Jean-Paul, chasseur, le port d’arme, mais personne n’était venu saisir ses armes. Ce matin-là, alors qu’elle venait de déposer ses enfants à l’école et à la crèche, elle est arrivée dans la cour de l’exploitation agricole où elle travaillait. Jean-Paul l’attendait, il l’a abattue d’un tir de fusil de chasse. Les proches envisagent de porter plainte contre les services de l’état. Gorses, Lot.

La suite, une prochaine fois.



Pas suffisant ?

Révoltes Posted on 9 août 2017 17 h 25 min

Ben non, la condamnation à 3000 € avec sursis prononcée à l’encontre de Cédric Herrou par le Tribunal correctionnel de Nice semble n’avoir pas été suffisante. Elle n’était, aux yeux d’une justice sans âme, qu’une mise en bouche, préalable, on le devine, à d’autres indignes “punitions” censées décourager les plus belles solidarités.

Car que punit-on ?
La fraternité. Ce fut ici-même écrit.
Mais aussi, toute forme de liberté d’entraide.

Toute capacité que nous avons à choisir entre le malheur imposé aux uns et le très relatif petit bonheur que, faisant partie des autres, nous essayons de fabriquer (…aux fins de le partager avec les autres).

Hier, l’engagement humaniste de l’’agriculteur de Breil-sur-Roya (Alpes-Maritimes),
militant de la solidarité et de l’aide aux migrants, dont je parlais dans mon précédent billet,
a été davantage encore méprisé et condamné !

On ne fait pas dans la dentelle quand on prétend avoir raison.

Ce 08 août, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a porté à quatre mois de prison avec sursis la peine qu’une société qui se prétend “juste et humaine” estime devoir infliger à un homme qui – n’acceptant pas la souffrance d’hommes, de femmes, d’enfants venus d’ailleurs – vient à leur secours.

Le pouvoir a fait vœux que le malheur ne se voie pas. Quitte à l’enfermer ?

HONTE !



Fraternité condamnée

Révoltes Posted on 5 août 2017 10 h 54 min

Lu dans la presse, l’autre matin :

« On continuera à agir et ce n’est pas sous la menace d’un préfet ni les insultes d’un ou deux politiques que nous arrêterons. Nous continuerons car c’est nécessaire de continuer », a lancé Cédric Herrou à la sortie du tribunal correctionnel de Nice ce vendredi matin.

L’agriculteur militant a été condamné à 3000 euros d’amende pour avoir pris en charge des migrants en Italie, mais a été relaxé pour les autres faits qui lui étaient reprochés, notamment leur hébergement ainsi que leur transport sur le territoire français.


Nous y voilà donc à ce point (de non-retour ?) que tout humaniste depuis longtemps craignait.
Un gouvernement européen – de ceux qui ne cessent de clamer haut et fort leur attachement aux principes fondamentaux de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (1948, et sans cesse violée) – fait le pas de condamner celui qui, un peu trop à son goût sans doute, en respecte et en fait respecter certains des articles les plus symboliques : les 13 et 14 !

Ainsi, de la devise d’une France de plus en plus autoritaire et arrogante, s’efface, parce que devenu hypocrite dans un État qui ne le respecte pas, le beau mot de FRATERNITÉ.

Parce que, ne nous y trompons pas ! c’est bien l’aide à un frère humain qui a été pénalisée ! Et c’est bien la liberté qu’a un être humain de trouver ailleurs que chez lui de l’aide qui est ainsi fragilisée !
C’est l’aide à des hommes, des femmes, des enfants en détresse qui est jugée et sanctionnée !
La France plaide désormais pour le chacun pour soi dans la peur de l’État, grand ordonnateur des générosités, de celles bienvenues, de celles qui ne le sont pas.
La conscience du citoyen, n’en parlons pas !

LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ, disaient-ils. Qu’en reste-t-il ?

Aide celui qui en a besoin mais fais gaffe à tes fesses ?

C’est à cette devise-là qu’il va falloir en France, mais aussi un peu partout en Europe, qu’on s’habitue ?
Et qu’on obéisse ?

BLÂME !



Après janvier, février…

Révoltes Posted on 19 juillet 2017 18 h 42 min

Je continue ici la sombre énumération entamée dans le billet “Salmigondis” du 03 juillet. Il s’agit de violences fatales faites aux femmes, vous vous rappelez ?

Cette manière de poser des noms sur des victimes jusque-là anonymes, c’est le quotidien Libération qui en est l’origine.

On peut lire l’ensemble de l’article ici. Les textes sont de Titiou Lecoq.

FÉVRIER

Elle s’appelait Karen. Elle avait 37 ans. Elle était caissière. Elle avait une fille de 3 ans et demi. Elle avait quitté le père, 45 ans, employé agricole, quinze jours auparavant. Ce vendredi-là, vers 13 heures, elle venait déposer leur fille chez lui. Ils ont commencé à se disputer. Karen a tenté de partir mais il l’a suivie et l’a poignardée. Il s’est ensuite retranché chez lui et s’est suicidé. Maison-lès-Chaource, Aube.

Elle s’appelait Fatima. Elle avait 58 ans. Lui 65. Ils étaient parents de trois enfants. Ils se disputaient parce qu’il la soupçonnait d’une infidélité. Il l’a frappée à coups de poing puis avec une feuille de boucher au visage et à la poitrine. Il a ensuite téléphoné à leur fille pour lui annoncer qu’il avait tué sa mère et qu’il allait se suicider. Il a raccroché et s’est défenestré du quatrième étage. Quelques semaines auparavant, elle était sortie de chez elle en pyjama en criant à l’aide, qu’il allait la tuer. Il avait été placé en garde à vue et avait reçu un rappel à la loi. Il avait également fait une tentative de suicide et était sorti récemment d’hôpital psychiatrique. Rueil-Malmaison, Hauts-de-Seine.

Elle avait 46 ans. Elle a été retrouvée morte étranglée dans le sous-sol de sa maison. A ses côtés, son mari était dans un état critique. Ils avaient 5 enfants, âgés de 12 à 24 ans. Après avoir été hospitalisé, il a été placé en garde à vue. Il a expliqué s’être violemment disputé avec sa femme, être tombé et puis le trou noir. Aucun souvenir. Elle envisageait de le quitter. Quelques semaines auparavant, il avait porté plainte contre elle pour menaces de mort et le même jour, elle avait déposé plainte contre lui pour violences conjugales. Nanteuil-lès-Meaux, Marne.

Elle s’appelait Gisèle. Elle avait 53 ans et travaillait depuis dix-neuf ans comme femme de ménage à la mairie de Pleucadeuc. Elle était mère et grand-mère. Elle avait quitté le domicile conjugal depuis cinq semaines pour s’installer chez sa fille. Ce dimanche-là, elle était partie en randonnée avec une amie, elles avaient passé l’après-midi ensemble. Vers 19 heures, Gisèle est partie de chez son amie. Elle s’est installée dans sa voiture. Son mari, 54 ans, employé dans l’agroalimentaire, qui était stationné dans un véhicule à côté, lui a tiré dessus à bout portant à quatre reprises avec son fusil de chasse. Il est ensuite venu s’asseoir sur le siège passager, à côté d’elle, et a retourné l’arme contre lui. Il s’est blessé au visage. Il était connu de la police pour des problèmes d’alcool et des faits de violence. Son avocat a expliqué : «Il n’a ni prémédité, ni préparé son acte. Il a pété les plombs, voilà tout.» Pleucadeuc, Morbihan.

Elle s’appelait Jennifer. Elle avait 31 ans. Elle était séparée de son conjoint, Loïc, mais ils vivaient encore ensemble ainsi qu’avec leurs deux enfants âgés de 3 et 7 ans. Jennifer avait prévu de déménager en février. Mais elle a disparu. Un avis de recherche a été lancé. Elle était portée disparue depuis deux mois quand son corps a été retrouvé dans un ravin. C’est son ancien compagnon, Loïc, 31 ans, employé à l’aéroport de Bastia, qui a indiqué aux enquêteurs l’emplacement de son corps. Il a reconnu avoir étranglé Jennifer. Elle l’aurait menacé avec un couteau. Il a ensuite déplacé le corps avec sa voiture et l’a dissimulé dans la végétation en contrebas d’une route. Il s’est débarrassé du téléphone et de la voiture de la victime. Son avocate a déclaré qu’il regrettait douloureusement son geste. Vescovato, Haute-Corse.

Elle s’appelait Rita. Elle avait 58 ans. Elle était conductrice de cars. On lui a tiré dessus un matin devant son entreprise. Selon le procureur, il s’agirait de son ex-compagnon, Alberto, 59 ans, qui aurait ensuite retourné l’arme contre lui mais serait encore en vie. La rupture était récente. Alberto avait déjà été condamné en Italie, en 1988, pour le meurtre de sa compagne de l’époque. Elle avait refusé de l’épouser. Condamné à huit ans de prison, il en avait fait quatre. Montmélian, Savoie.

Elle s’appelait Stéphanie. Elle avait 30 ans. Elle travaillait dans une mutuelle à Corbeil-Essonnes. Il y a deux ans, elle a rencontré Lothaire, 33 ans. Elle travaillait pour la cantine d’une société pour laquelle Lothaire faisait une mission de consulting en informatique de quelques mois. Il l’a draguée mais Stéphanie n’était pas intéressée. Elle a ensuite changé d’emploi. Elle sortait de son travail à la mutuelle, un soir à 18 heures. Lothaire l’attendait. Il avait dissimulé sous son manteau un fusil à pompe et de quoi l’attacher, son plan étant de la kidnapper. Mais elle s’est débattue. Il lui a tiré dessus deux fois puis s’est fait exploser la tête. Corbeil-Essonnes, Essonne.

Elle s’appelait Sylvie. Elle avait 47 ans. Elle était aide à domicile. Elle était en instance de divorce avec Claude, 50 ans, carrossier. Le jour où il devait quitter le domicile conjugal, il l’a abattue avec un fusil de chasse puis s’est pendu. Rigny-le-Ferron, Aube.

Elle s’appelait Marie-Rose. Elle était «octogénaire». Elle avait travaillé à France Télécom. Son mari, René, l’a poignardée dans la cuisine puis s’est pendu dans le garage. Longjumeau, Essonne.

À bientôt ?



Après nous les mouches ?

Révoltes Posted on 3 juin 2017 10 h 22 min


NO COMMENT.



À la vie À la mort ?

Révoltes Posted on 20 mai 2017 20 h 12 min

C’est en Place de Grêve.

Le peuple, le bon peuple, nourri de justice, de patriotisme (à moins que ce ne soit de vengeance exaltée et de haine) s’y précipite à l’aube au spectacle terrifiant des mises à mort des quelques-uns (des quelques trop) qu’un droit aveugle, sans humanité a condamnés à ne vivre plus.

La peine de mort, alors que devrait s’imposer la justice, fait régner la terreur.

C’est qu’on croit que faire peur empêchera les voleurs, les tueurs (parfois les penseurs), de voler, de tuer.
De penser.

C’est dans ces années-là.
Au dix-neuvième siècle, disons.
Et puis au vingtième, au vingt-et-unième.
Mais surtout depuis toujours,
partout où les hommes ont confondu vengeance et justice. Ou suprématie et justice.
Mais ça pourrait être aujourd’hui, puisque c’est encore aujourd’hui.
Plus là sans doute, (mais la tentation régulièrement reprend les bouchers de se faire justice),
plus en Place de Grève, mais ailleurs.
Ailleurs où c’est encore possible. Ailleurs où c’est la loi (Et ça change si vite et si souvent, la loi…)

Cet ailleurs-là – serait-il réduit à un pays, à une ville, à un village, à un pâté de maisons – il faudrait toujours le combattre, lui faire savoir que la vie a un droit imprescriptible sur la mort.

La Place de Grève, c’est aujourd’hui très majoritairement en Arabie Saoudite, en Chine, au Japon, en Iran ou aux États-Unis qu’elle vit ses (derniers ?) beaux jours.

On n’y demande plus au peuple de venir hurler sa vindicte, de hurler sa haine au moment où le condamné grimpe sur l’échafaud afin de s’y faire qui pendre, qui rouer de coups à mort, qui écarteler, qui définitivement charcuter par une guillotine lame.

Joie ! Le peuple peut aujourd’hui rester chez lui, chez sa télévision et y apprendre la mort – ici par pendaison, là par injection, ailleurs par décapitation, par lapidation où par quelque autre moyen toujours sordide – de celui-ci, de celui-là qui a, aurait ou n’aurait pas fait ou commis ceci ou cela..

On s’améliore, non ?

Badinter, bien sûr, nous a débarrassés de cette part de barbarie que s’offrait encore la justice avant lui.
Mais le loup de la mort donnée en toute légitimité n’est pas tout à fait mort pour autant.
L’homme, qui n’est pas un ange, retrouve ses crocs dès qu’il a faim de ses voisins.
Certains, même ici, en Europe, en agitent encore le fléau.
Faire peur a encore de beaux jours à vivre.

Sur la peine de mort, nos amis d’Amnesty ont produit et diffusent ce petit film dont il n’est pas idiot de rappeler l’existence.

(votre connexion est lente ? Un peu de patience…)

[KGVID]https://usercontent.one/wp/leblog.baobabcreation.fr/wp-content/uploads/2019/08/la-peine-de-mort.mp4[/KGVID]

La peine de mort nous avait déjà à plusieurs reprises inspirés pour notre TamTam.
Découvrez-en les occurrences en cliquant sur les visuels leur correspondant.

Décembre 2007 :


Avril 2012 :


À bientôt ?



Quand Donald s’invente un destin animé…

Révoltes Posted on 26 janvier 2017 16 h 39 min

Tout se passe bien, pas à dire.

À peine ai-je eu le temps de poser ici mon dernier (bref) billet reprenant l’article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, que Ubu Trump Premier, fraîchement investi à la tête de ce qu’il est convenu d’appeler la première puissance mondiale (mais à quoi bon être puissant si c’est pour être aussi bête ?) fait des siennes.

Roulant des mécaniques surgonflées d’un superman de kermesse, la mèche au vent et le menton mussolinien, le pouce césarien et l’index autoritaire, le drôle, de moins en moins drôle, annonce les grands pas en avant qu’il compte faire franchir à son Amérique chérie.

On aurait bien envie de rire sauf que l’histrion adopte des poses de serial killer qui, lui allant bien au teint qu’il a volontiers sanguin, collent aussi à des intentions qu’il annonce plus belliqueuses que seulement méprisantes.

La peur, souvent, est ainsi faite.

La peur, aussi, est le sang qui sert d’intelligence à ceux qui résolument en manquent. La peur, et faire peur.

Il n’aura pas fallu longtemps pour que Donald (pas celui de Disney, même si quelque ressemblance pourrait porter à confusion) confirme qu’il entendait bien nous assurer du pire. Entendons-nous, de ce que nous croyons être le pire. Mais le pire, c’est à craindre, est à venir. Et sans doute viendra.

Ainsi, Donald (mais peut-être est-ce Picsou ?) vient de signer une tripotée de décrets tous plus progressistes et humanistes les uns que les autres.

Quand il n’est pas d’accord avec ce qui a été fait – fût-ce pour le bien des Américains (mais pas seulement) – il détricote, il ordonne son inverse, ne connaît pas de honte. La honte, il est vrai, suppose une conscience qui aille au-delà de ses propres intérêts et sombres ambitions.

Le but de celui qui juge qu’ »il faut traiter les femmes comme des bêtes et les attraper par la chatte” ? Revenir en arrière de huit ans, semble-t-il. Avant qu’un negro se soit emparé de ce pouvoir qui ne peut appartenir qu’aux blancs.

Retour en arrière de quelques décennies, en fait. Voire d’une siècle ou deux.

Vaste programme.

Et on détricote, et on détricote.

Parmi les premières décisions (on s’accroche ?) :

– la construction de ce fameux mur entre le Mexique et les États-Unis;
– la création d’une prison réservée aux prisonniers faits dans le cadre de la guerre contre Daesh;
– le retour à ce que j’appellerai l’état Bush de la torture, etc…

Le mur de séparation ?
On en parlait, il y a plus de 10 ans (octobre 2006) dans notre TamTam.
C’était déjà une honte.

Rien, pour Donald, ne semble avoir changé.

Une prison spécifique pour terroristes ?

C’était Guantanamo, non ? Où les droits de l’Homme n’étaient qu’un mirage. Je me trompe ?

C’était la colère du TamTam 13 (mai 2007)

On refait les même horreurs ?
On continue ? On revient encore et encore à la barbarie ?
Bel avenir !


L’utilisation de la torture ?

Donald la juge efficace.
On rêve !

Amnesty International (mais pas seulement) prouve depuis des années son inutilité. Sauf à détruire la vie d’innocents. Parce que, oui, souvent, ce sont des innocents qu’on torture, à force de les croire coupables. Et on détruit leur vie !
Pas grave.

Beau progrès, Donald !

C’était la colère des TamTam 06 (décembre 2006) :

et 21 (octobre 2008) concernant la torture plus spécifique “de la baignoire” (autorisée par G.W.Bush et interdite ensuite par l’administration Obama) :

Décidément, on s’améliore, on s’humanise, on ouvre les bras, on avance.

À nous de !

À bientôt ?



Pourquoi faire mal quand on peut faire pire ?

Révoltes Posted on 14 décembre 2016 15 h 23 min

Alors voilà.

Jour après jour, Alep continue de payer son tribut à la haine.

Aujourd’hui détruite, en grande partie avec la complicité passive de la si supportable indignation des gouvernements qui décident de ne rien faire tant qu’il en est encore temps, la ville servira sans doute d’exemple pour d’autres massacres que les mêmes gouvernements condamneront mais ne feront que condamner, fermement, diront-ils, mais trop heureux de n’avoir pas, se soulageront-ils, à s’engager.
(voir en PS un texte de Victor Hugo datant du 29 août 1876)


La communauté internationale, sous le honteux parapluie d’un pusillanime prétexte (On ne peut pas accueillir toute la misère du monde) acceptera d’offrir un temps l’hospitalité à quelques poignées de « migrants », histoire que les émotions se tassent. On oubliera, les peuples oublieront leur refus de solidarité avec toutes ces familles ravagées, mutilées, bousillées, détruites. Et on rentrera chaque soir chez sa télévision se disant qu’on l’a échappé belle.

Amnesty International, dans un très simple petit film, essaie, une fois de plus, une fois encore, de réveiller les consciences en tordant le cou à quelques idées reçues, si généralement fausses sur l’accueil des « migrants”. À voir ci-dessous.

[KGVID]https://usercontent.one/wp/leblog.baobabcreation.fr/wp-content/uploads/2019/08/les-réfugiés.mp4[/KGVID]

Le thème des « migrants », TamTam l’a abordé un certain nombre de fois.

La première fois, il y a 10 ans. (cliquez sur le visuel pour visionner la livraison)

Une autre fois en septembre 2015 :

À bientôt ?

PS. (le texte de Victor Hugo annoncé plus haut. Bonne lecture !) :


Il devient nécessaire d’appeler l’attention des gouvernements européens sur un fait tellement petit, à ce qu’il paraît, que les gouvernements semblent ne point l’apercevoir. Ce fait, le voici : on assassine un peuple. Où ? En Europe. Ce fait a-t-il des témoins ? Un témoin, le monde entier. Les gouvernements le voient-ils ? Non.

Les nations ont au-dessus d’elles quelque chose qui est au-dessous d’elles les gouvernements. À de certains moments, ce contre-sens éclate : la civilisation est dans les peuples, la barbarie est dans les gouvernants. Cette barbarie est-elle voulue ? Non ; elle est simplement professionnelle. Ce que le genre humain sait, les gouvernements l’ignorent. Cela tient à ce que les gouvernements ne voient rien qu’à travers cette myopie, la raison d’état ; le genre humain regarde avec un autre œil, la conscience.

Nous allons étonner les gouvernements européens en leur apprenant une chose, c’est que les crimes sont des crimes, c’est qu’il n’est pas plus permis à un gouvernement qu’à un individu d’être un assassin, c’est que l’Europe est solidaire, c’est que tout ce qui se fait en Europe est fait par l’Europe, c’est que, s’il existe un gouvernement bête fauve, il doit être traité en bête fauve ; c’est qu’à l’heure qu’il est, tout près de nous, là, sous nos yeux, on massacre, on incendie, on pille, on extermine, on égorge les pères et les mères, on vend les petites filles et les petits garçons ; c’est que, les enfants trop petits pour être vendus, on les fend en deux d’un coup de sabre ; c’est qu’on brûle les familles dans les maisons ; c’est que telle ville, Balak, par exemple, est réduite en quelques heures de neuf mille habitants à treize cents ; c’est que les cimetières sont encombrés de plus de cadavres qu’on n’en peut enterrer, de sorte qu’aux vivants qui leur ont envoyé le carnage, les morts renvoient la peste, ce qui est bien fait ; nous apprenons aux gouvernements d’Europe ceci, c’est qu’on ouvre les femmes grosses pour leur tuer les enfants dans les entrailles, c’est qu’il y a dans les places publiques des tas de squelettes de femmes ayant la trace de l’éventrement, c’est que les chiens rongent dans les rues le crâne des jeunes filles violées, c’est que tout cela est horrible, c’est qu’il suffirait d’un geste des gouvernements d’Europe pour l’empêcher, et que les sauvages qui commettent ces forfaits sont effrayants, et que les civilisés qui les laissent commettre sont épouvantables.

Le moment est venu d’élever la voix. L’indignation universelle se soulève. Il y a des heures où la conscience humaine prend la parole et donne aux gouvernements l’ordre de l’écouter.

Les gouvernements balbutient une réponse. Ils ont déjà essayé ce bégaiement. Ils disent : on exagère.

Oui, l’on exagère. Ce n’est pas en quelques heures que la ville de Balak a été exterminée, c’est en quelques jours ; on dit deux cents villages brûlés, il n’y en a que quatrevingt-dix-neuf ; ce que vous appelez la peste n’est que le typhus ; toutes les femmes n’ont pas été violées, toutes les filles n’ont pas été vendues, quelques-unes ont échappé. On a châtré des prisonniers, mais on leur a aussi coupé la tête, ce qui amoindrit le fait ; l’enfant qu’on dit avoir été jeté d’une pique à l’autre n’a été, en réalité, mis qu’à la pointe d’une bayonnette ; où il y a une vous mettez deux, vous grossissez du double ; etc., etc., etc.

Et puis, pourquoi ce peuple s’est-il révolté ? Pourquoi un troupeau d’hommes ne se laisse-t-il pas posséder comme un troupeau de bêtes ? Pourquoi ?… etc.

Cette façon de pallier ajoute à l’horreur. Chicaner l’indignation publique, rien de plus misérable. Les atténuations aggravent. C’est la subtilité plaidant pour la barbarie. C’est Byzance excusant Stamboul.

Nommons les choses par leur nom. Tuer un homme au coin d’un bois qu’on appelle la forêt de Bondy ou la forêt Noire est un crime ; tuer un peuple au coin de cet autre bois qu’on appelle la diplomatie est un crime aussi.

Plus grand. Voilà tout.

Est-ce que le crime diminue en raison de son énormité ? Hélas ! c’est en effet une vieille loi de l’histoire. Tuez six hommes, vous êtes Troppmann ; tuez-en six cent mille, vous êtes César. Être monstrueux, c’est être acceptable. Preuves : la Saint-Barthélemy, bénie par Rome ; les dragonnades, glorifiées par Bossuet ; le Deux-Décembre, salué par l’Europe.

Mais il est temps qu’à la vieille loi succède la loi nouvelle ; si noire que soit la nuit, il faut bien que l’horizon finisse par blanchir.

Oui, la nuit est noire ; on en est à la résurrection des spectres ; après le Syllabus, voici le Koran ; d’une Bible à l’autre on fraternise ; jungamus dextras ; derrière le Saint-Siège se dresse la Sublime Porte ; on nous donne le choix des ténèbres ; et, voyant que Rome nous offrait son moyen âge, la Turquie a cru pouvoir nous offrir le sien.

De là les choses qui se font en Serbie.

Où s’arrêtera-t-on ?

Quand finira le martyre de cette héroïque petite nation ?

Il est temps qu’il sorte de la civilisation une majestueuse défense d’aller plus loin.

Cette défense d’aller plus loin dans le crime, nous, les peuples, nous l’intimons aux gouvernements.

Mais on nous dit : Vous oubliez qu’il y a des « questions ». Assassiner un homme est un crime, assassiner un peuple est « une question ». Chaque gouvernement a sa question ; la Russie a Constantinople, l’Angleterre a l’Inde, la France a la Prusse, la Prusse a la France.

Nous répondons :

L’humanité aussi a sa question ; et cette question la voici, elle est plus grande que l’Inde, l’Angleterre et la Russie : c’est le petit enfant dans le ventre de sa mère.

Remplaçons les questions politiques par la question humaine.

Tout l’avenir est là.

Disons-le, quoiqu’on fasse, l’avenir sera. Tout le sert, même les crimes. Serviteurs effroyables.

Ce qui se passe en Serbie démontre la nécessité des États-Unis d’Europe. Qu’aux gouvernements désunis succèdent les peuples unis. Finissons-en avec les empires meurtriers. Muselons les fanatismes et les despotismes. Brisons les glaives valets des superstitions et les dogmes qui ont le sabre au poing. Plus de guerres, plus de massacres, plus de carnages ; libre pensée, libre échange ; fraternité. Est-ce donc si difficile, la paix ? La République d’Europe, la Fédération continentale, il n’y a pas d’autre réalité politique que celle-là. Les raisonnements le constatent, les événements aussi. Sur cette réalité, qui est une nécessité, tous les philosophes sont d’accord, et aujourd’hui les bourreaux joignent leur démonstration à la démonstration des philosophes. À sa façon, et précisément parcequ’elle est horrible, la sauvagerie témoigne pour la civilisation. Le progrès est signé Achmet-Pacha. Ce que les atrocités de Serbie mettent hors de doute, c’est qu’il faut à l’Europe une nationalité européenne, un gouvernement un, un immense arbitrage fraternel, la démocratie en paix avec elle-même, toutes les nations sœurs ayant pour cité et pour chef-lieu Paris, c’est-à-dire la liberté ayant pour capitale la lumière. En un mot, les États-Unis d’Europe. C’est là le but, c’est là le port. Ceci n’était hier que la vérité ; grâce aux bourreaux de la Serbie, c’est aujourd’hui l’évidence. Aux penseurs s’ajoutent les assassins. La preuve était faite par les génies, la voilà faite par les monstres.

L’avenir est un dieu traîné par des tigres.



Emballé, c’est pesé !

Révoltes Posted on 28 novembre 2016 16 h 06 min

C’est en 2016.
C’est en novembre.
C’est à la caisse d’une enseigne qui vend papier cul, shampoing, fruits, légumes, boissons, et toutes ces choses dont on consomme de peu discrètes quantités. Un peu plus, beaucoup plus sans doute qu’on devrait. On a pris ces habitudes-là d’avoir un frigo plein, des armoires pleines. Quitte à jeter, une fois les légumes défraîchis, les yaourts périmés, les envies passées.
C’est comme ça qu’il faut qu’on fasse pour vivre bien, nous souffle, nous dit, nous chante, nous hurle deux fois plutôt qu’une la publicité.

C’est en novembre 2016, disais-je.
Ça fait cinq mois que les « sacs plastique de caisse » sont interdits. Priorité absolue au papier, biodégradable, lui. On veut lutter contre ce sixième continent invisible (ou presque) fait de ces plastiques nuisances jetées par centaines de milliers dans les océans (entre autres) et qui, non dégradables, éradiquent à eux seuls des pans entiers de vie.

L’homme s’améliore, se dit-on. Plein de bonnes intentions, se dit-on. Sauf que.

Sauf que :
des sacs plastique, j’en trouve toujours à la caisse de la supérette du quartier. Avec slogans publicitaires débiles et mensongers, « quadrichromés », « flashis”, vulgaires, et qui me chargent de faire la pub d’une qualité de vie (“mangez sain, manger bio”) qu’elle veut, dit-elle, préserver. Dont elle serait garante. On se fout de qui ?

Sauf que :
inondés d’informations à juste titre plus alarmantes les unes que les autres sur la destruction de la planète (par nous, dégueulassement encouragés par les grandes multinationales de l’agroalimentaire et de la lessiverie qui prétendent s’en préoccuper), sur le dérèglement climatique, sur la fonte des glaces aux pôles, sur l’appauvrissement de la biodiversité,… nous ne changeons rien, ou presque à nos habitudes de vie.
Ni, singulièrement, à nos habitudes de (sur)consommation, encourageant de facto les comportements criminels des marchands d’obésité, de bonheurs climatisés et d’hygiène chimiquement parfumée. Complicité.


Je sais, on connait certain ex-chef d’état capable de colporter que l’écologie consiste à revenir à l’éclairage à la bougie. Celui-là n’était pas très éclairé. Il vient du reste de s’éteindre. La planète ne s’en plaindra pas.

Sur le sujet (le respect de la planète, pas celui d’un politicien véreux) :

– Demain, le très positif (mais pas naïf) film de Cyril Dion et Mélanie Laurent;

– L’urgence de ralentir, une réflexion de Philippe Borrel pour Arte TV;

– Impliquons-nous, un court opus en forme de conversation entre le philosophe Edgar Morin et le plasticien Michelangelo Pistoletto. (Éditions Actes Sud. 8,80€)

Il y a presque 10 ans, en février 2007, TamTam questionnait :


Cliquez sur le visuel pour visionner cette livraison-là.

À bientôt ?

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