Ben non, la condamnation à 3000 € avec sursis prononcée à l’encontre de Cédric Herrou par le Tribunal correctionnel de Nice semble n’avoir pas été suffisante. Elle n’était, aux yeux d’une justice sans âme, qu’une mise en bouche, préalable, on le devine, à d’autres indignes “punitions” censées décourager les plus belles solidarités.
Car que punit-on ?
La fraternité. Ce fut ici-même écrit.
Mais aussi, toute forme de liberté d’entraide.
Toute capacité que nous avons à choisir entre le malheur imposé aux uns et le très relatif petit bonheur que, faisant partie des autres, nous essayons de fabriquer (…aux fins de le partager avec les autres).
Hier, l’engagement humaniste de l’’agriculteur de Breil-sur-Roya (Alpes-Maritimes),
militant de la solidarité et de l’aide aux migrants, dont je parlais dans mon précédent billet,
a été davantage encore méprisé et condamné !
On ne fait pas dans la dentelle quand on prétend avoir raison.
Ce 08 août, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a porté à quatre mois de prison avec sursis la peine qu’une société qui se prétend “juste et humaine” estime devoir infliger à un homme qui – n’acceptant pas la souffrance d’hommes, de femmes, d’enfants venus d’ailleurs – vient à leur secours.
Le pouvoir a fait vœux que le malheur ne se voie pas. Quitte à l’enfermer ?
HONTE !
J’ai continué la lecture, ce matin, d’un petit livre de Henry David Thoreau (1817-1862) :
La Désobéissance civile *.J’y ai trouvé ces lignes qui font écho à tes derniers articles sur ton blog, et j’ai pensé que peut-être, elles t’intéresseraient.“Cela fait six ans que je ne paie pas la Poll Tax. On m’a mis en prison pour cela, une fois, pour une nuit. Et, alors que je contemplais les murs de pierre massifs de deux ou trois pieds d’épaisseur, la porte de bois et d’acier d’un pied d’épaisseur, et les barreaux de fer qui filtraient la lumière, je ne pus m’empêcher d’être frappé par la vanité de cette institution qui me traitait comme si je n’étais fait que de chair, d’os et de sang qu’on pouvait enfermer. Je m’étonnais du fait que cette institution ait pu conclure, au terme de sa réflexion, que c’était là le meilleur usage qu’elle pouvait faire de moi, et qu’elle n’ait jamais pensé user de mes services en aucune autre manière. Je vis que, s’il y avait un mur de pierres entre moi et mes concitoyens, un autre se dressait devant eux, encore plus difficile à franchir, avant qu’ils puissent être aussi libres que je l’étais. À aucun moment je ne me sentis enfermé, et les murs me semblaient un vaste gâchis de pierre et de ciment. J’avais l’impression d’être le seul de tous mes concitoyens à m’être acquitté de mon impôt. À l’évidence ils ne savaient pas comment me traiter et se comportaient comme des gens mal élevés. (…)”En lisant ces mots je pense à Cédric Herrou et à ceux qui, comme lui, agissent pour ce qui leur semble être juste. Je réalise en lisant Thoreau que leur force est double, car non seulement ils s’opposent au gouvernement et dénoncent ses manquements par une contestation pacifique et réfléchie, qui ne peut que pousser d’autres hommes à réfléchir à leur tour, mais aussi ils agissent dans le respect de leurs valeurs profondes, d’une humanité fondamentale, et par là ils se respectent eux-même (“Il me coûte moins à tout point de vue de subir le châtiment encouru pour avoir désobéi à l’État qu’il m’eût couté d’y obéir. Dans ce dernier cas, je ne pourrais que me sentir misérable.” Du même Thoreau).Voilà, petite réflexion du matin, que j’avais envie de partager avec toi…
* La désobéissance civile – Henry David Thoreau – édité chez Gallmeister (Totem classique) – 3€