Encore du quotidien aujourd’hui.
Et de l’air, l’air de rien.



Le printemps

Aujourd’hui, c’est le printemps, oui. Je sens, en écrivant, que j’ai bu un peu trop. Le vin, ici, est très fort, douze ou treize degrés. Très africain du Nord.
Nous nous sommes un peu baladés, T. et moi, cet après-midi. Elle s’était levée, il faisait beau – le temps fait le beau, comme les chiens. Nous sommes un peu avancés sur les Plomarchs, d’où la baie tire une magnifique langue. Deux arbres en fleurs, ces maisons le unes sur les autres comme si elles se protégeaient – en fait elles se détestent – cette eau bleue, verte, noire, blanche, la mer, qui vient se reposer par ici – voir un peu ce qui s’y passe – et le soleil par-dessus cette espèce de forêt géométriquement légendaire derrière nous, bon, ça allait à peu près.
C’est le printemps. Dans l’air, je ne sais quels canons bénéfiques, qui lancent des obus fleuris. Tenons-nous en là.



Le flair

Il faut bien croire que nous avons une odeur, puisque les chiens nous suivent par le nez. Sinon, par quoi ? Chaque matin, je fais les courses, je l’emmène, je l’entraîne. Il me suit, en faisant beaucoup de gestes d’enthousiasme. Au marché, je le laisse. Il me laisse. Je le vois, de loin, s’occuper du derrière d’une demoiselle, ou d’un monsieur – on sait que les chiens n’y regardent pas de si près, malgré les apparences – à sa convenance. Je reviens à la maison. Il est là. Il m’attend, cul contre la porte, se léchant la chose essentielle. Je pense que c’est le flair qui le fait revenir chez lui. Si c’était autre chose il faudrait en conclure que les chiens sont plus intelligent que les hommes. Qu’ils sont passés par là. Qu’ils ont compris. Et du même coup, localisé leur intelligence. Point de mots. Du nez. Je serais assez de cet avis. Mais pour le moment, c’est le purgatoire.


Extraits de Papiers collés (2)
Éditions Gallimard – L’Imaginaire

Un peu court aujourd’hui, j’en conviens.
C’est comme ça, les perrosiennes marées.
Tantôt houleuses, tantôt si discrètes qu’on ne les entend pas… (enfin, j’exagère un peu.)

À demain quand même ?