May b.
Maguy Marin


Je me souviens du “Je me souviens” de Georges Perec.

Il y avait là comme une intense folie du rien qui n’en finissait pas de se dire.
Mieux : de se raconter.

Je me souviens de ce comédien inoubliable, Samy Frey,
disant le texte de Perec, sur un vélo,
sur un câble tendu par-dessus une scène de théâtre (c’était à l’Opéra comique, je crois)
et qui disait, entre autres somptueuses banalités :

Je me souviens du silence
qui accompagnait le défilé des dissidents chinois sur les Champs-Élysées
le 14 juillet 1989 peu après les événements de Tiananmen.

Et puis :
“Je ne me souviens pas du moment de ma naissance.”

Et puis :
Je me souviens de l’annonce de la mort de Brassens.
Je me souviens des papiers peints
où d’énormes formes géométriques oranges et jaunes
s’épanouissaient sur fond noir ou marron.”
Je me souviens du jour de la mort de Jacques Prévert,
mais plus de quel jour c’était précisément.

Et puis, et puis, et puis…

Je me souviens d’un soir, dans les années 80,
à Bruxelles, où je vivais alors et où,
au Palais des Beaux-Arts,
je fus secoué, comme en amour on peut l’être,
par la découverte d’une tellurique authenticité.
Un ballet désobéissant qui m’apparut comme une naissance.

Dans une petite salle feutrée, contrite et bourgeoise,
je rencontrais à la fois Beckett, Artaud et une soif aride de vérité.

C’était Maguy Marin, alors jeune chorégraphe.
C’était May B.
C’était un regard profond sur ce que nous sommes,
sur nos limites, sur nos envies,
sur notre parfois splendide pauvreté.
C’était et c’est toujours Maguy Marin.

Se souvenir. Mais sans regret. Sans nostalgie.
Pour prendre la mesure du temps.
De ce qu’il nous reste à faire de ce beaucoup-là.


Un coup d’œil ci-dessous.






On s’en parle ?


PS.: May B est repris ce 07 déc au Théâtre de l’Oliver à Istres
PS2: Pour connaître les dates et lieux de la tournée 2020, c’est ici.