Le type,
sur sa tombe,
a fait écrire
J’aurai essayé.

Sans même la moindre date.

Les gens passent,
baguenaudent gravement.
On va fleurir ses morts.
Ou les tombes, c’est selon.

Y’a pas foule, mais.
Ça va gentiment,
ça s’ennuie.
Ça fait le petit devoir de se rappeler.
Ou de faire semblant
de ne pas faire semblant.

Personne ne relève
les mots du type qui dit sur sa tombe
qu’au moins
il aura essayé.
Pas même un enfant.

Il n’y en a pas.
On n’emmène pas les enfants
voir les tombes des messieurs
qui ont essayé,
parmi d’autres qui ont fait semblant,
de ne pas faire semblant.

Quand ils l’écrivent sur leur tombe,
c’est, se dit-on, qu’ils n’ont fait que ça.
C’est dit.
C’est sentencié.

Ceux qui se sont tus,
dont les noms sur les tombes
sont suivis des dates de commande
et de livraison,
qui n’ont peut-être rien fait,
ou alors pas grand chose,
c’est autre chose.
Visite.
Une fois par an.
Sous la pluie.
Parce qu’il pleut dans les cimetières
le plus souvent.
C’est ce qu’on dit.

On aime tellement la modestie des autres,
de ces autres-là qui se taisent,
qui ne clament rien.
La modestie des morts,
c’est tout ce qu’on leur laisse.

Le type, sur sa tombe, a fait écrire
– lèse-majesté ! –
sans même la date de production
ni celle de péremption,
J’aurai essayé.
Qui nous le prouve ?
Et essayé quoi ?

Si pas la moindre date,
pas même sûr qu’il soit mort, le type.
Ni qu’il ait vécu.

Il s’est peut-être vanté.
C’est ça, oui.
Tout simplement.
Quel manque de modestie !

J’aurai essayé.
Qu’est-ce qu’il aura essayé ?
Ça, il ne le dit pas.
C’est toujours comme ça,
le silence.

Il y a des parapluies un peu partout.
Des tombes qui n’ont rien à déclarer,
se taisent.
Quelques fleurs.