Deuxième jour de “re-confinement”.
Et dans cette adversité, Georges Perros. À lire, à (re)découvrir.
Étape dix-neuf. Vous suivez ?



Qu’est-ce qu’un homme qui n’arrête pas d’écrire ? Qui refuse délibérément tout ce qui pourrait faire obstacle à ce qui appelle son œuvre . L’amour de la littérature vaut les autres amours. S’il ne s’y mêle aucune impossibilité majeure, à quoi bon aimer ? Un amour absolu n’a aucune sens. On ne peut aimer absolument que le rien. Sinon, on transige. On montre ses plaies pour détourner l’attention de ce rien, pour cacher ce que tout homme, dans sa vie, a fait de vil, de mesquin, d’ambitieux. Nous sommes tous, ou à peu près, des damnés apprivoisés, des salauds plus ou moins salauds. Mais la moindre distraction fait sauter le couvercle. Avoir connaissance de cela, malgré le mutisme général, est un cas de solitude. Car il y a des choses auxquelles on ne peut faire aucun mal. Des éléments. Le ciel, la mer. Se colleter avec, c’est jurer qu’on renonce au mal “humain”, sans pour autant renoncer à l’amitié, voire à l’amour. Ambigu ? Difficile. Mais pas impossible, j’espère.



Quelle chance avait Socrate de ne pas avoir à lire Platon ! Ces gens plus intelligents que nous n’avaient pratiquement rien à lire. Nous, plutôt faibles, sommes écrasés. D’où le besoin de s’affranchir d’une culture terrifiante, en lui volant dans les plumes, ou en l’ignorant totalement.



Nous pourrions tous nous suicider, parce qu’il n’y a rien à attendre, et que nous sommes des êtres d’attente, incapables d’aucun progrès, à partir de cette légère prise de conscience à la poésie, sans pour autant nous délivrer du sous-monde, qui vomit du péché en ivrogne absolu.



Moins je mens, plus je rougis.



Il y a le suicide. Ces n’est pas mal. Mais on aurait dû penser à son contraire.



On apprend que X, qui a écrit ce matin même une lettre d’injures, ouverte, à Z, dîne ce soir chez ce dernier. C’est beau, l’intelligence démocratique. Tout le monde fait joujou. Sacrée Marianne.



Dimanche

Repos des ruelles silence
Tout le village agenouillé
Avale sa prière et pense
Aux gros gâteaux du pâtissier
Dans un coin l’enfant se demande
Pourquoi diable Dieu se coucha
Le septième jour ô limande
Où glisse l’ennui d’être là.


Extraits de Papiers collés (2)
Éditions Gallimard – L’Imaginaire

Demain, nous serons aux deux tiers de notre périple.

Belle journée confinée à vous !