JOUR 2

Et patatras, on est déjà demain.
Volp a dormi mais ne s’en souvient pas.
Un hurleur le réveille, c’est son réveil ou alors il se trompe.
Volp a aimé programmer son téléphone portable et c’est le chant d’un coq qui.
Bon, on n’est pas là pour juger.
Dernier ronflement d’espoir d’encore un peu, puis évanescente lucidité, il va falloir. 
S’arracher.

Volp somnambule vaille que vaille à fleur de savates direction la salle de bains,
rouge sang la salle de bains avec un lavabo blanc et on dirait qu’il saigne.
Mais halte obligée d’abord à la cuisine.
Papilles pas tout à fait remises d’un biriani avalé la veille,
langue encore un chouya préoccupée d’huile de sésame grillé.
Le dentifrice d’avant-sommeil ne s’est pas tout à fait défait des affres du dit biriani.
A dormi là et dort encore en catimini puis se réveille,
entre une dent qui se déchausse et une autre qui frise la carie,
un souvenir de gingembre et d’huile un peu cramée, c’est comme ça.
Pas très appétissant, non, mais c’est comme ça.

Et le café du matin ne fait rien pour arranger les choses.
Les haleines se superposent sans la moindre gène, ne se cachent pas l’une l’autre.
Pourtant, Volp tient à ce petit machin liquide noir qui tient dans une tasse
qu’il tient à l’instant dans sa main qui ne tient plus à rien ou alors à ne pas trembler.
On compte toujours un peu trop sur le café du matin.

Fin de baguette tranchée puis grillée à la poêle,
pas très branché électro-ménager, Volp, pas de micro-ondes, pas de congel, pas de toaster donc…

C’est pas tout ça, on continue, gelée de framboise dont il a,
avec des prudences d’horloger,
ôté une diaphane couche de moisissure, une transparence à peine un peu verte,
rien de plus.
Pain grillé, gelée de framboise industrielle sur film de beurre salé.
C’est frugal.
C’est avant la douche. C’est un moment d’ennui.

Aussi, Volp a-t-il posé sur la platine laser du séjour,
comme pour prévenir un chagrin qui, sait-on jamais, pourrait ressurgir ou naître,
devinez quoi ?


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Ça dépote pas mal, Sarah.
Toute seule avec sa contrebasse, faut le faire quand même.
Rien qu’elle et l’instrument ! Vous imaginez ?
Et puis, avec ça, qu’est-ce qu’on fait ?
On fait ça, et c’est pas n’importe quoi.
Vous entendez ?

Là, Volp allonge un peu les jambes.
On grignote une fin de tartine,
on écoute, on se la repasse, deux fois, trois peut-être,
on a bien envie de s’en allumer une,
on hésite, et puis non, c’est le mois sans tabac,
alors on ouvre les fenêtres,
on songe en battant la mesure, on songe à quoi ?
Que c’était bien quand même, hier soir, My Favorite things
Mais le Bœuf Indigo fermé, ils exagèrent !

Moi, c’est quoi, au juste, se demande Volp, mes choses préférées ?

Et il se remet à rêver…

Que faire ? Aller au turbin ?
Mais le turbin de Volp depuis quelques mois, c’est d’en chercher.
Je voudrais vous y voir.

Et donc, c’est après une douche tant qu’il y en a encore,
que s’apprête à glisser Volp vers on ne sait trop quoi ou qui
qui lui proposerait de, ou alors non vous n’avez pas le profil.
C’est comme ça.

Heureusement, à cette heure il ne pleut pas.
Heureusement, parce que les grolles, hier soir, ont morflé
et que ne leur restent que des allures un peu tristes, de misère,
entre nous on peut se l’avouer.

Volp fait taire la laser.
Il est sur le point de sortir vers l’enfer
de la recherche d’un travail
où il n’y a rien à faire,
quand il se souvient.

La course, hier soir.
Le confinement.
Rester chez soi, la joie.
C’est gagné.

Et on recommence à vivre.
Laser !!!

My favorite things, mes choses préférées, c’est aussi ça.
Louis Sclavis. Clarinette basse.
Ondulantes ondées, se dit Volp, poète au rabais.

 

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Il commence comme ça, ce confinement.
Volp ne s’en plaint pas.
Sauf le Bœuf Indigo, of course. Là, il enrage.
Mais doucement.


À demain ?